« Hey hey ! C’est la version 25.23.89, celle d’hier se terminait par 92… » L’archiviste fit une pause et à travers ses yeux vitreux du Mon Calamari, Cyan pu voir beaucoup de confusions. Il sourit de toutes ses dents et prit les papiers que le pauvre employé avait dans les bras et les posa sur un bureau proche avant de chercher à l’intérieur. « Ha ! Là ! » Il pointa son doigt sur un des papiers. « Mise à jour des consignes diplomatiques 25.23.94 ! C’est le document que je cherche… » Il plia le papier et le mit dans une de ses poches avant de rendre le tas de papier au pauvre archiviste dépassé. Ce n’était pas facile de se retrouver indépendant. Malgré les réunions et documents de transitions d’indépendance offerts par la République, il fallait dire que chaque département se retrouvait dans une merde noire. Passer de simple bureau régional à un ministère seul, c’était comme refaire une nation à partir de rien. Les messages ministériels et les consignes sénatoriales pleuvaient chaque jour comme pour essayer de combler le vide.

Cyan n’enviait pas les juristes. Dans deux semaines ils devaient alléger les lois et la constitution pour rendre l’application des décrets et règles plus accessibles. Il fallait aussi épurer les lois contradictoires et créer des protocoles simplifiés. Mais ça, c’était impossible sans ministre… Pour le moment, le diplomate le plus âgé, un mirialan qui ne voyait plus très clair et semblait en avoir par-dessus les épaules de tous ces papiers, était en charge des Affaires Étrangères. Personne dans le ministère ne pouvait faire quoi que ce soit et le gouvernement se chargeait de la liaison lui-même le temps que tout soit mis en place. Ce n’était pas plus mal, mais Cyan se sentait frustré. C’était un beau parleur, qui vivait pour débattre, argumenter et s’entendre déblatérer des phrases toutes faites. Pas à se perdre sous des directives qui ne seront plus bonnes le lendemain. Il rentra dans son bureau et s’installa, posant le papier. Il relut le numéro d’édition avec un sourire « 25.23.94… » Et il hocha la tête avant de jeter le papier directement dans la poubelle. Dans cinq minutes, on lui en apporterait certainement un autre…

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Il ressortait à peine d’une réunion de discussion sur les nouveaux départements du ministère des Affaires Etrangères. Il avait dans les bras, un gros dossier et il entendait son comlink sonnait. Il bougonna alors qu’il essayait de voir l’écran de son appareil de communication quand quelqu’un lui attrapa le bras. « Mais qu’est-ce que tu fais là ? » Il se retourna, c’était un des juristes du département d’économie. « Quoi qu’est-ce que je fais là ? Je retourne à mon b-… » « Mais tu as pas entendu ? » « Entendu quoi ? » Dans les quelques minutes qui étaient passées, pendant lesquelles il regagnait son bureau, l’Empire avait pénétré les frontières planétaires de Coruscant et s’était stationné au-dessus d’un district avant d’entamer une espèce d’invasion.

Le cœur d’Cyan loupa un battement. « C’est la guerre ? » demanda-t-il. Il eut l’impression que quelqu’un d’autre que lui posait cette question. Le juriste haussa les épaules sans rien dire. Le diplomate se mit alors à courir dans les couloirs. Des feuilles s’échappèrent de son dossier et il s’arrêta une seconde, hésitant à les ramasser, avant de les abandonner. Quand il arriva au ministère, c’était le branle-bas de combat. On courrait partout, presque tout le monde était sur son comlink, criant, parlant ou chuchotant. Finalement la voix du ministre se fit entendre de son sifflement rauque habituel dans les hauts parleurs. « Réunion d’urgence. Maintenant. Salle de réunion principale. ». Cyan ne prit pas le temps de retourner à son bureau et se précipita dans la salle de réunion, pour trouver sa place attitrée de diplomate. Il posa le dossier qu’il avait transporté depuis sa précédente réunion et se rendit compte qu’il ne se rappelait même plus de ce qui s’était dit.

Quand Antar Sollon entra dans la salle, des questions fusèrent de toute la salle. Cette dernière était de forme ovale, répartie sur plusieurs niveaux. Les diplomates étaient sur le rang de devant et ensuite les portes paroles se répartissaient en groupe jusqu’au mur du fond. Le chagrien s’installa sur le bureau central, faisant face à tout le monde et se tut. Après quelques secondes, le calme revint dans la salle, même si l’angoisse et le stress pouvait être palpable. Finalement, le ministre prit la parole.

« L’Empire n’est pas en train d’envahir Coruscant. Nous avons reçu un message nous informant qu’ils détachaient une délégation impériale dans un de nos districts. »

Cyan leva la main, timidement, le chagrien l’impressionnait assez mais il avait du mal à comprendre ce que cela signifiait.

« Oui ? » dit simplement Antar Sollon. « Nous n’avons pas été prévenu qu’un district était cédé à l’Empire… De quand date cette décision ? » Le ministre observa gravement l’humain avant de reporter son attention sur le reste de la salle.

« Cet état de fait n’est pas le fruit d’une quelconque décision ou négociation de la part du gouvernement de Coruscant. » cette phrase provoqua un torrent de murmures étouffés et indignés. Tentant de calmer le brouhaha qui commençait à s’élever doucement mais surement, Antar Sollon reprit « Dans ce contexte politique fragile et incertain, nos consignes sont de rester neutres. L’Empire ne semble pas vouloir étendre ses bases sur d’autres Districts pour le moment. Des directives précises vous seront envoyées, à tous. Veuillez les lire avec beaucoup de soin. En attendant, j’impose un silence diplomatique opaque. Aucune déclaration, officielle ou personnelle, sur ce qu’il vient de se passer. Toute entorse à cet ordre sera sanctionnée par un renvoi pur et simple. » Puis il se leva avant de sortir sous les exclamations de frustration de la foule.

Cyan, dans son siège, avait la gorge sèche. Est-ce qu’ils allaient devoir s’exiler à Hosnian Prim encore une fois ? Serait-ce aussi facile que la dernière fois, pendant la guerre, s’ils ne faisaient plus partie de la République ? Il ne savait plus très bien quoi faire. Retourner dans son bureau lui semblait impossible. Entendre tous les autres ruminer, angoisser et se plaindre allait lui miner totalement le peu de moral qu’il lui restait.

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Il se tenait dans l’embrasure de la porte. Il se sentait encombrant. Sa grande taille était généralement un avantage dans son métier, il était imposant, il intimidait certains adversaires… Mais là, il aurait aimé se faire plus petit, plus discret. « Tu m’aimes pas c’est ça ? » lança la jeune femme d’un ton qui oscillait entre la constatation et la véritable question. Cyan ne savait pas trop quoi faire, comment parler, pour dire quoi… Il ouvrit la bouche avant de la refermer, cherchant de meilleurs mots. « Non c’est… » Il se tut et la jeune femme grogna de frustration avant de continuer de ranger ses affaires dans un sac. Cyan était résigné face à sa situation. Si la plus part des femmes appréciaient son envie d’aller doucement, voire très lentement, voir son côté platonique, les relations qui duraient semblaient vouées à l’échec. « Écoute, ce n’est pas ça, c’est juste que ça ne m’intéresse pas. » Il fit un pas en avant dans la chambre à coucher. Il avait les épaules basses, la mine fermée et les mains moites. La femme se redressa. « Je ne t’intéresse pas ? » Il leva les mains en signe d’apaisement. « Non ce n’est pas ce que j’ai dit ! J’aime bien quand on s’embrasse, quand on est ensemble, quand on parle, mais je n’ai pas besoin de coucher avec toi pour t’aimer. » Cela sonnait étrange dans sa voix, il n’avait jamais vraiment exprimé tout ça. Il n’avait jamais vraiment prit le temps de formuler cet aspect de sa vie, et surtout, il s’était toujours voilé la face. Il arrivait à simuler, à prendre des médicaments pour camoufler, mais avec elle, il avait eu envie de ne rien lui cacher et de ne rien omettre. La femme observa un instant Cyan et secoua la tête. « Non, non, je ne peux vivre avec un homme qui se force pour coucher avec moi. » tout était dit. Cyan se poussa pour la laisser sortir de son appartement et il attendit un instant, seul, dans le silence. Soudainement, il aurait préféré les éclats véhéments des réunions des diplomates ou la gêne partagée des négociations avec l’Empire et la Nouvelle République. La vie privée, la vie romantique, ce n’était peut-être tout simplement pas pour lui…

Son comlink émit une sonnerie et sembla le réveiller de ses pensées. Il le porta à ses yeux pour y lire « Réunion d’urgence » Il appela immédiatement son assistant qui ne prit même pas le temps de se fendre en politesse protocolaire et lui dit directement « Le ministre de la sécurité vient de boucler le District 1313. Apparemment il y a des affrontements assez lourds, possiblement en réponse au blocus. » Il raccrocha et mit son manteau avant de sortir précipitamment. Malgré les mauvaises nouvelles qui allaient certainement tomber avec ce genre d’évènement, quelque part, Cyan était soulagé de pouvoir se noyer sous le travail.