Coruscant, -10. « Parle moi de lui. » Le regard animé d'une curiosité insatiable, appuyée contre le buste de sa mère, une petite fille à la chevelure brune a le regard étincelant, brulant de mille questions. Reika a six ans, et sa mère ne lui a jamais dissimulé la réalité de ses origines. Son père, elle ne l'a jamais vu, et ne le verra probablement jamais, puisque hélas, il ignore son existence même, séparé de sa mère par une embuscade de l'empire. Elle s'est échappée de justesse, sans savoir qu'elle portait alors son enfant. Kilian. Elle est tombée amoureuse de lui rapidement, il était brave, un pilote hors du commun, un véritable héros. Souvent, la petite fille se surprenait à se demander comment les choses se seraient passées si son père était à ses côtés. Est-ce qu'ils piloteraient de planète en planète, en vagabonds heureux, insouciants du poids de l'Empire ? Probablement pas, mais elle aimait se faire toute sorte de scénarios. Elle peut néanmoins se targuer d'être bien entourée: Sa mère prend soin d'elle comme une véritable perle, et l'homme qui partage sa vie l'élève comme un véritable père, si bien qu'en grandissant, elle lui avoua le considérer comme tel. Son véritable père sera toujours un autre, un inconnu, peut-être mort aujourd'hui, mais elle a eu la chance d'en avoir un second, qui lui a appris à appréhender la vie et ses aléas. Et pour cause, il fait partie de la rébellion, que la mère de Reika aide secrètement au sein de Coruscant depuis des années déjà, en récupérant toutes les informations utiles à propos de l'Empire. Discrétion et perspicacité. Voilà le crédo des Amnell, dès l'enfance de Reika.. Et d'avantage encore en grandissant.

Coruscant, -1. « N'y va pas maman, s'il te plait! » Je me souviens encore de comment ma supplique résonnait dans toute la pièce, alors que ma mère devait partir travailler. Il ne faut pas qu'elle parte. Je le sens, j'ai un pressentiment inexplicable qui fait que depuis ce matin, je ne veux pas qu'elle s'en aille. Mais doucement, elle attrapa ma main pour l'étreindre, et m'accorder un sourire. Me rassurer. « Mais qu'est ce qui ne va pas, Reika ? C'est une journée comme une autre, dis moi pourquoi aujourd'hui plus qu'hier je devrais rester ici. » J'ai gardé le silence, me mordant l'intérieur de la joue, cherchant désespérément mes mots, quelque chose susceptible de la retenir. Mais rien ne vint. Et aujourd'hui encore, je me dis que c'est ce qui m'a pris ma mère. Elle a été arrêtée, et je n'ai rien pu faire, j'étais impuissante face aux forces impériales, impuissante face à ces pourritures de l'Empire. Alors, j'ai suivi mon beau père, même si je lui ai donné du fil à retordre, ne voulant pas quitter Coruscant sans elle. Mais il a fini par me convaincre: Si nous restions, nous finirions arrêtés comme elle, figures de la résistance. A bout de forces, je l'ai suivi. Et c'est là que je me suis retrouvée propulsée au cœur de la guerre. Mon quotidien était entouré d'hommes, certains me regardant avec curiosité, d'autres avec respect. Progressivement, avec le temps, j'ai appris à me mêler à eux, bien que restant une sorte de mascotte pour les groupes, la fille Amnell, celle qui leur souhaite bonne chance avant une bataille. Mon beau père a toujours prêté attention à mes avis, mes idées, mes intuitions. Il a toujours énormément cru en moi, et mon potentiel, sans véritablement savoir d'où me venait cette facilité à avoir des idées. J'ai toujours été pleine de ressources, mais encore une fois, ça n'a pas suffit.

Année 0, peu après la bataille de Yavin. - « Reika.. » - « Maman! » Quelques hommes portaient le corps de Melinda, avec précaution, comme s'il s'agissait d'une poupée sur le point de se briser. Et ma mère allait se briser. Mon beau père tenait sa main, le regard brillant. Je crois que je ne l'avais jamais vu aussi fragile. L'Empire l'avait torturée, blessée, sa vie ne tenait qu'à un fil, et ce sentiment d'impuissance me gagnait à nouveau. Parce que je savais déjà qu'elle allait m'échapper, à peine l'eus-je retrouvée. Mais je luttais, je gardais espoir, j'ignorais cette intuition qui me tordait le ventre. « Économise tes forces, on va t'emmener loin d'ici, et tout ira mieux, tu verras! » Je n'étais qu'une gamine de seize ans, déroutée, et j'avais encore besoin d'elle, je ne pouvais pas la perdre, pas si tôt.. Et pourtant, elle s'est éteinte, juste après avoir demandé à son époux de prendre soin de moi. Je me souviens d'avoir pleuré, longuement. Les hommes de la Résistance ne m'ont plus approché pendant une semaine, ont respecté mon silence et ma douleur. Mon beau père lui-même a respecté mon mutisme quelques jours, avant de tenir sa promesse, me forçant à prendre mes repas, à sortir de ma chambre. Mais ça faisait trop mal. Regarder les autres et me dire que jamais je n'y verrais à nouveau le visage de celle qui m'a donné la vie, qui m'a élevée et tout appris. J'ai perdu ma mère, mon modèle, mon repère. Jusqu'au jour où mon beau père est venu avec une lettre, qu'il a posée en silence contre mon oreiller, m'intimant de la lire lorsque je serais prête. Dès qu'il a franchi la sortie de la pièce, je l'ai ouverte. L'écriture de ma mère m'arracha d'abord quelques larmes, avant que je n'y découvre des informations. Si d'un côté elle me disait d'être forte, de l'autre, elle me donnait des informations importantes: Sur l'identité de mon père, son nom, ce qu'il faisait dans la vie. Alors, j'ai eu un faible espoir. Celui de pouvoir un jour retrouver mon père, et lui dire que ma mère n'est pas morte, et que je suis née de leur amour, bien qu'écourté par l'Empire.

Année 4, peu après la bataille d'Endor. - La bataille d'Endor fut probablement la plus difficile pour nous tous. Alors âgée de vingt ans, j'ai appris à me défendre avec une aisance déconcertante au fil des années, me battant avec une légèreté et une facilité qui a toujours étonné mon beau père. Mais ce jour là, lorsque je l'ai vu s'éloigner sur le champ de bataille, j'ai voulu encore une fois le retenir. Cette même sensation me saisissait, comme le jour ou j'ai voulu retenir ma mère de partir travailler. Mais mon beau père a toujours été un homme brave, refusant de flancher devant le danger. Je pense qu'il avait une idée de ce que ma supplique voulait dire pour lui. Alors, il m'a simplement embrassé le front, et m'a demandé de ne pas le suivre. J'ai désobéi. J'ai couru à toutes jambes, bravant les soldats de l'Empire avec rage, et j'ai espéré pouvoir sauver mon beau père. Mais que peut faire une gamine de vingt ans face à autant de Stormtroopers ? Le dernier souvenir que j'ai eu est celui du corps de mon beau père, alors que je sombrais doucement dans l'inconscience.

Lorsque je me suis réveillée, j'étais entourée de visages inconnus. Mais la première chose qui a attiré mon regard, c'est ce jeune homme, à peine plus âgé que moi, les traits gagnés par la fatigue, mais qui m'observait avec un intérêt presque déconcertant. Puis, j'ai vu à sa ceinture un objet qui n'était qu'une légende à mes yeux: Un sabre laser. Un Sith ? Dans un bref sursaut, j'eus un mouvement de recul, avant de sentir une main faire une pression sur mon épaule pour m'apaiser. Un des hommes qui a combattu auprès de mon beau père a veillé sur moi, et m'a sortie de la galère dans laquelle je m'étais mise à suivre mon beau père lors de la bataille. Les choses se sont rapidement enchaînées pour moi. Le jeune homme s'est penché pour s'asseoir près de moi, et m'a demandé simplement : « Reika, c'est ça ? Je suis Luke Skywalker. » LE Luke Skywalker ? Je ne l'avais jamais rencontré encore. L'homme à l'origine de la bataille de Yavin et de la destruction de l'étoile noire. Et, j'allais vite l'apprendre, celui grâce à qui la guerre s'est soldée par la mort de l'Empereur Palpatine. « Est-ce qu'on t'a déjà parlé de la Force et des Jedis ? » Sourcils froncés, j'ai doucement hoché la tête, intimidée, hésitante. « Ma mère me racontait des histoires étant enfant. Sur la Force de l'ordre Jedi, ses maitres et ses chevaliers. » Mais à mes yeux, à l'époque, ils n'étaient qu'un mythe, un mythe que j'ai désespérément espéré être réel, jusqu'à ce que j'apprenne qu'il n'y avait plus qu'un seul Jedi. Luke Skywalker. « Tu n'as jamais eu des intuitions plus fortes que toi, des sensations étranges ? Une impression que tu savais déjà de que tu devais faire, ce qui allait arriver ? » Légèrement surprise, et encore difficilement réveillée, j'ai simplement hoché la tête. Toute mon enfance a été bercée de ces intuitions, de ces douleurs lorsque je savais que quelque chose n'allait pas. Un homme est revenu auprès de Luke, ils ont eu un bref échange, et c'est là que sa phrase a changé ma vie: « Ton taux de midi-chloriens est impressionnant, Reika. Tu as la force. Et si tu l'acceptes, j'aimerais t'apprendre à la maitriser. A devenir un Chevalier Jedi. »

Année 6, Yavin IV:  « Restaurer l'ordre Jedi ? » Doucement, Luke hocha la tête de haut en bas. « J'étais convaincu d'être le dernier Jedi, mais tu n'es plus la seule chez qui j'ai pu sentir la force, Reika. Je veux leur enseigner la maitrise de la Force, ce don qu'ils ont peut-être sans même le savoir. » Lèvres pincées, j'ai fini par hocher la tête, comprenant ou voulait en venir mon maître. Depuis deux ans, j'apprends la maitrise de la Force à ses côtés. Peu à peu, lors de nos périples, Luke a senti la Force chez d'autres personnes, des enfants comme des adultes qui ignorent tout de ce qu'ils sont, de ce qu'ils représentent. Un nouvel espoir. Je me redressais alors, mes doigts passant doucement sur ma ceinture, où se trouvait accroché mon sabre laser, ma plus grande fierté, réalisé spécialement pour moi. Puis, je me tournais vers Luke, inquiète. « Mais fonder un nouvel ordre Jedi, n'est-ce pas un risque que certains puissent basculer du côté obscur de la Force comme l'a fait.. » Je suspendis ma phrase, réalisant que j'allais évoquer le père de Luke, devenu le plus grand Seigneur Sith de tous les temps. Luke s'est également redressé, venant poser une main sur mon épaule. « Il y a une grande colère en toi, Reika, depuis que l'Empire t'as pris ta mère et ton beau père. Beaucoup de peur, aussi, de ne jamais trouver ton véritable père. Ce sont des émotions qui peuvent te conduire toi-même à basculer du côté obscur de la Force. Dois-je pour autant arrêter ton enseignement ? » Après un long moment de silence, je réalisais qu'il avait raison. Luke lui-même pouvait basculer du côté obscur de la Force, nous étions tous susceptible de finir Jedi noir. Mais il fallait avoir de l'espoir. « Non. » Répondis-je alors simplement, avec un sourire à peine perceptible. Peu de temps après, le Sénat autorisait la quête de mon maître, et nous avons commencé à chercher de potentiels détenteurs de la Force. Au fond, il y a quelqu'un d'autre que j'espérais croiser au fil de notre route: Mon père, dont je n'oubliais pas le nom, gardant précieusement la lettre de ma mère toujours auprès de moi. Mais la quête de Luke était plus importante et plus grande que mes motifs personnels, et surtout, je devais d'abord terminer ma formation.

Et au final, c'est notre recherche de padawans qui me fit croiser sa route. Kilian Viltaria, contrebandier aigri et peu enthousiaste malgré l'évidente Force vivant à travers lui. Luke faisait preuve d'une passion et d'une diplomatie qui, à mes yeux, permettait de le suivre jusqu'au bout du monde. Néanmoins, mon père semblait peu convaincu. Je me souviens être restée en retrait, en compagnie d'autres padawan, certains plus jeunes que moi, d'autres plus âgés. J'ai observé discrètement les traits de cet homme, dissimulant avec soin les émotions qui me gagnaient alors que je me demandais si j'avais ses yeux. Mais comment voulez vous dire à un homme d'une quarantaine d'années qu'il est père et ne l'a jamais su ? J'ai imaginé notre rencontre des centaines de fois. Et au final, je n'ai pas eu le courage de lui parler, de lui dire la vérité. D'un certain côté, je pense aussi qu'il ne correspondait pas à mes attentes. Le héros que ma mère me dépeignait se trouvait être bourru, agressif, silencieux. Mais Luke croyait avec ferveur en son potentiel. Alors, je voulais y croire également. Sans être en mesure de lui révéler que nous partageons le même sang.

Année 9, quatre mois auparavant. « Tu es un de mes premiers padawans, Reika. Le plus prometteur, également. » Cinq longues années s'étaient écoulées depuis ma première rencontre avec Luke Skywalker. Plus qu'un maitre, il est devenu un ami, que je respectais profondément, et qui prenait soin de nous tous, croyant en nos potentiels. « Merci, maitre. » - « Et je pense que très bientôt, tu pourras devenir également un chevalier Jedi. Peut-être même un jour un maitre, tu as le calme et la rigueur nécessaire à l'enseignement de la Force. Cependant, il te reste une épreuve à réussir, et je ne peux pas t'aider sur celle ci. » J'ai relevé les yeux vers Luke, intriguée. J'ai toujours pris soin de relever les obstacles, d'écouter ce qu'il avait à m'apprendre avec une attention que je n'avais jamais accordée à personne en dehors de ma mère. « Que faut-il que je vainque ? » - « Toi-même, Reika. Toi et ta plus grande crainte, c'est la seule entrave à ce que tu embrasses pleinement ta condition de Jedi. C'est ta réserve qui représente ton unique faiblesse. » Et ma plus grande crainte s'entraîne à seulement quelques mètres de nous. Mon propre père. Je déglutis, resserrant nerveusement mes mains autour de mon sabre laser. Il serait plus simple pour moi de terrasser n'importe quelle créature. Alors pourquoi? Pourquoi faut-il que je doive faire ça ? Finalement, j'ai soupiré. « Je ne suis pas prête. »

Année 9, Yavin IV, deux mois auparavant. « Partez! » Des corps. Des corps partout, des enfants, des adultes, et des ombres qui avançaient vers nous, menaçantes, semant la mort. Luke me pris par les épaules pour me forcer à reculer. « Il faut que tu t'en ailles, Reika, maintenant! » Entêtée, je fis jaillir la lame de mon sabre laser, sans bouger d'un pouce. « Laisse moi me battre à tes côtés, je suis prête, je défendrais les autres avec toi! Nous sommes nombreux à maitriser la Force! » Au moment ou je disais ces mots, un nouveau cri de douleur déchira le silence. Je me retournais, prête à me battre. Mais Luke attrapa mon sabre pour en ranger la lame, et l'accrocher à ma ceinture. « Obéis moi et vas t'en, emmènes tous ceux que tu pourras sauver avec toi. Fais moi confiance! » Le hurlement de terreur d'un enfant finit par me convaincre. Keni, jeune garçon padawan d'une dizaine d'années, se trouvait non loin. Je lui attrapais la main fermement pour l'entrainer avec moi. « Suis moi et ne te retourne surtout pas ! » Une pièce, puis une autre. Le temple semblait interminable, pour la première fois de ma vie. A chaque pas de porte, j'avais la crainte de voir le corps de mon père, mais aussi l'espoir de croiser sa route, en vain. Dans une grande salle, proche des vaisseaux, un stormtrooper avec une vibrolame me faisait face. « Caches toi.. Et ne sors sous aucun prétexte. » Autoritaire, j'envoyais Keni se cacher, avant de sortir mon arme. Jusque maintenant, mes combats ont toujours été assez simples, et pour la première fois de ma vie, j'allais affronter la Force sans qu'il ne s'agisse d'un entraînement dans le temple avec d'autres chevaliers. S'ensuivit un long combat, durant lequel je fus blessée à l'épaule. Mais j'ai fini par triompher. Soulagée, mais affaiblie, ma main appuyait sur la plaie à mon épaule, pour arrêter le sang. Je cherchais le jeune garçon que je protégeais, et lorsqu'il sorti de sa cachette, les choses ont été tellement... Tellement vite. Une ombre, un coup de blaster, et.. Il l'a tué. Le corps du petit garçon est tombé à terre, sans vie, et mon cri résonna, marqué par la douleur. J'ai échoué. Trop faible pour m'engager dans un nouveau combat, j'ai été contrainte de prendre la fuite... Seule. Je n'ai vu aucun autre Jedi sur ma route.

Année 9, D'Qar. Aujourd'hui je suis meurtrie, cachée, et perdue. Luke est mort lors de l'attentat du temple de Yavin IV, ainsi que de nombreux autres chevaliers et padawans qui étaient mes amis. Je ne sais même pas s'ils ont tous été tués ou si certains ont pu s'enfuir... Je suis seule... Diablement seule. J'ai fini par rejoindre la résistance organisée par Leia Organa Solo. Je sais que la sœur de mon maitre est sage, et surtout, décidée à lutter contre les vestiges de l'Empire de façon efficace, pas comme le Sénat qui est trop lent à mon goût, trop passif. Quant à ma condition de Jedi... Je ne sais plus si je dois l'enterrer à jamais ou au contraire, perpétrer la mémoire de Luke Skywalker. Mon sabre reste caché sous mes vêtements, sans jamais être utilisé. Je n'ai de cesse de me répéter que si j'avais écouté Luke, si j'avais été parler à mon père, j'aurais été prête, et j'aurais pu lutter à ses côtés. J'aurais peut-être fait une différence, aussi infime soit-elle. Alors est-ce que je mérite seulement ce sabre? Luke m'aurait probablement dit que oui. Alors j'essaie d'enterrer ma peur derrière une autre quête qui m'attend en parallèle... Je suis intimement convaincue que mon père est toujours en vie, je le sens, et mes intuitions ne me trompent jamais. Je l'ai vu maitriser la Force, et j'ai besoin de lui dire ce que je n'ai pas su lui dire avant. Peut-être alors me suivra-t-il, et nous lutterons aux côtés de la résistance, contre l'Empire, et contre la menace qui nous a anéantis au temple Jedi.