Je claque doucement des doigts. Cela n'a pas spécialement de raison d'ailleurs, c'est quelque chose que je fais parfois inconsciemment. La gamine est instable, émotionnellement parlant. Je ne connais que trop cette façon ambivalente d'agir, comme si elle ne savait pas réellement ce qu'elle voulait. Le vent souffle autour de nous, sans agressivité, presque trop doucement. Les mèches de mes cheveux lâchés s'étalent sur mon visage. Pourtant aucun muscle ne bouge.

« Mon appartenance... »

répètais je doucement, savait elle seulement a quel point je pouvais Lui appartenir ? Sans doute pas. C'était une dualité que je maintenais comme telle au prix de ma propre âme.

« Pourquoi te mentirais je ? Je le pourrais sans aucun doute, mais je n'y vois pas d'intérêt. »

Le claquement lancinant de mes doigts s'arrête subitement lorsqu'elle se lève. Je l'avoue, elle a l'honneur de me surprendre. J'ai envie de lui éclater de rire au nez. Un rire sans doute amer et terriblement cynique. J'avais été élevée pour être Chevalier. J'avais aimé un homme comme un frère sur ce chemin. J'avais été trahie, abandonnée, nourrissant l'amertume de mon cœur. J'avais choisis une voie qui n'appartenait qu'a moi, du moins l'avais je cru. Mais cette voie là ne menait nul part. Je n'avais plus de but, plus d'envie. Alors il était revenu. Noir. Sombre. Obscur. Et étrangement avec lui était née la haine, la colère, la rage...Et l'espoir. Un nouveau but, une nouvelle ambition. Une raison de se battre sans cesse, jusqu'à m'écarteler entre les pôles de la Force, ne résistant que grâce a une volonté sans commune mesure et cet espoir tenu qui ne voulait pas mourir. Oui, je voulais éclater d'un rire empoisonné parce qu'elle ne sait pas ce qu'elle me demande.

« C'est vrai, tu ne sais pas qui je suis. Et toi, tu ne sais pas ce que tu demande. Qu'importe ta naissance, le savais tu ? Je suis née de Jedi. Une génération exceptionnelle après qu'on ne l'est cru éteinte à jamais. J'étais l'espoir de ma famille en quelque chose de meilleur, j'étais l'élève trop frondeuse d'un Maitre adoré, la sœur d'un padawan presque divinisé. C'est vrai, j'étais tout ça. Je tenais le même discours que le tien, parce que j'étais encore innocente de la véritable douleur. Même de la véritable haine. »

Je repose mon pied au sol, je pourrais paraître fragile ou en position inférieure face à elle, mais je sais que j'irradie d'une force qu'elle n'a pas. Qu'elle n'a pas encore mais qui sait...

« Dis moi Gamine...Que t'a-t-on appris ? »

Devrais je l'armer ? L'armer contre Lui ? Insidieusement ? Qu'elle possède les armes pour lui résister ? Je ne le savais pas. Devrais je la laisser l'approcher ? Une jalousie cruelle et haineuse mordit un bord de mon âme mais je la repoussais avec aisance, parce que j'avais appris a le faire.

« Parce qu'il n'y a ni bien ni mal en vérité, il y a toute une multitude de palettes. Les sentiments qu'un jedi contient...Sait il seulement comme il est bon de les laisser vivre et exsuder ? La sensation de vivre. Juste de vivre par la vibration d'une colère. Par la saveur âcre d'une haine. Par la souffrance d'un amour. Par la cruauté du mensonge. Cette sensation...est divine, je ne te le cache pas. Puis vient le pouvoir. Ce pouvoir sur l'autre qui enivre et ferait sombrer le plus vertueux des hommes. Parce que c'est ainsi, parce que l'âme est ainsi. »

je souris, presque férocement.

« Et une fois que l'on goûte au pouvoir, il est difficile de s'en passer. On s'en sert pour se protéger. On ment en croyant que c'est le mieux. On aime de façon égoïste. C'est ça être humain. Tu te demande ce que je suis ? Je suis humaine, Gamine, tout simplement. Je devrais me consumer dans l'Obscur et parfois je crains qu'il ne parvienne a annihiler totalement ce que je suis, parce que le faire apaisera la douleur qui me ronge. Mais il existe une chose que l'Obscurité ne peut totalement corrompre en moi. A ton avis, qu'est ce que c'est ? »

J'écoute les paroles de Lucrèce qui ne sont plus aussi perforante qu'il y a quelques minutes plus tôt. Toutefois, je me reconnais à travers ses mots, comme si ce qu'elle disait, était ma propre histoire à quelque détail près. Je suis née Sith, d'une génération portant le gène du sith au sang-pur, une race originaire de Korriban. Les Visiris sont une ancienne famille noire qui a survécu aux guerres et au temps lui-même. J'ai goûté à l'obscurité et j'ai été dégoûtée par sa saveur âcre et abjecte. Je m'écartais déjà de l'obscurité avant même de rencontrer la lumière qui m'est apparue plus douce et plus savoureuse, d'une très grande beauté. Je ne peux la juger pour son choix d'avoir quitté la lumière, comme elle ne pourrait me juger de mon choix d'avoir quitté l'obscurité. N'est-ce pas le choix qui nous définit ? Mais mon discours a une raison d'être logique qui est accompagnée de bons sens : un pouvoir puissant ce n'est jamais sans conséquence. Nous devons alors emprunter une manière de vivre afin que ceux qui nous entourent, n'en souffrent pas. Elle a été blessée et je trouve ça, très touchant de sa part de me partager à nouveau de son passé. Mais cela me montre justement qu'elle aussi, est aveuglée par ses propres émotions, elle ne les domine pas. Je dirais même qu'elle est comme moi... Rejetant le côté de la force qui l'a accueilli, n'adhérant pas totalement au côté à laquelle elle souhaite appartenir. Faisant d'elle un être qui n'appartient à ni l'un, ni l'autre. Quoique dans mon cas, comme elle tente par tous les moyens de me l'encrer dans mon petit crâne, j'appartiens aux deux. J'avoue ne toujours pas comprendre ce qu'elle voulait me dire par là, mais ces paroles précédentes me font penser à la petite fille... peut-être à tort, peut-être bien à raison. Elle me demande ce que on avait bien pu m'apprendre, un sourire naît sur mon visage de nouveau.

Un sourire de mépris, non pas destinée à Lucrèce, mais plutôt à cette question. Qu'avait-on pu m'apprendre ? N'était même pas la question à poser, il serait plus exactement de me demander ce qu'on ne m'avait pas encore appris. Je suis une guerrière, une guerrière Visiris avant d'être une guerrière Jedi. Chez les Visiris, l'éducation est quasi-militaire, dès que nous savons nous tenir sur nos jambes dès le plus jeune âge, nous sommes initiés à l'art du combat. Et avec le temps, les plus douées d'entre nous sont formés dans l'art de tuer une cible sans que celle-ci s'aperçoit d'une éventuelle présence. J'étais chaque jour destinée à une série de coup fouet à la moindre erreur, afin de plus craindre la douleur, mais de se l'approprier. Mère est allée plus loin que l'éducation traditionnelle, parce que j'étais née avec la force, parce que j'étais son héritière du pouvoir obscur. Elle qui avait des ambitions bien trop grand pour moi... Elle voulait que je sois bien plus qu'une guerrière, oh non... Elle voulait que je sois une Sith'ari, un messie pour ses congénères. Me faisant subir diverses tortures mentales et physiques, diverses expérimentations... j'étais son cobaye plus que sa fille. J'ignore ce qu'elle a voulu faire de moi, mais elle a très certainement échouée. Car je ne suis jamais devenue le monstre obscur qu'elle voulait que je sois. Oui. La question est bel et bien qu'est-ce que je n'ai pas appris. La sagesse, le savoir du côté lumineux, je n'ai pas eu le temps, cinq ans c'est trop peu... Luke voulait me former au sabre, une formation que j'avais déjà bien acquis avant de le rejoindre, de même des techniques de la force. Mais évidemment, il l'ignorait, parce que tout comme les autres je lui mentais sur mon identité, je mentais aussi sur ce que je savais de la force et de mes compétences aux combats. Je ne répondis donc rien à Lucrèce, elle devinerait certainement pourquoi...

On m'a rien appris qui soit nécessaire... J'écoutais Lucrèce poursuivre, silencieusement, relevant la tête pour l'observait. Intérieurement, je me demandais vraiment ce qu'elle avait vu en moi pour m'épargner. Disait-elle vraiment la vérité quelques minutes plus tôt ? Aurais-je une par sombre en moi dont je n'ai pas connaissance ? Si c'est le cas, alors mère a réussi à faire de moi ce qu'elle voulait sans même que je le sache. Lorsqu'elle me demande quelle est la chose que l'obscurité n'a pas totalement corrompue en elle... Immédiatement, je me pose la question à moi-même. Qu'est-ce que la force n'a pas pu corrompre en moi à l'époque où j'étais son esclave. Mon regard se détache de celui de Lucrèce pour aller m'asseoir à mon tour sur le rondin où elle était depuis le début. « Ta volonté ? » Répondis-je comme si je posais une question sans toutefois en être une.

Je ricanais doucement, secouant mes boucles lourdes a son commentaire :

« La volonté seule ne suffit pas. »

Je repoussai mes cheveux sur mon épaule droite, d'un geste qui pourrait paraître presque enfantin mais qui ne l'était pas réellement.

« La volonté se forge dans l'airain et je te dirais que tu n'en manque pas. Non, ce n'est pas cela qui me maintient dans un équilibre parfait, elle ne suffit pas lorsque tu navigue d'un côté à l'autre. Ce qui le fait est une petite émotion fragile que l'on nomme espoir. Étrangement et malgré tout, il ne m'a jamais quitté. Et il est très douloureux d'espérer, Gamine. »

Et j'en savais quelque chose, mais cette douleur ne détruisait pourtant pas cet espoir. C'était comme si il demeurait ancré en moi sans jamais frémir, sans même que sa carapace de cristal n'explose. C'était quelque chose que Darral ignorait car si il le sait, il s'acharnerait a vouloir le détruire. Je levai la main, indiquant un espace si petit entre mon pouce et mon index :

« Une si petite flamme dans l'Obscurité la plus totale. C'est elle que je regarde lorsque je crains de glisser, celle que je garde en tête lorsque je crois être définitivement séduite. Un simple fil aussi fragile que du verre dans la colère bouillonnante. Ma volonté ma conserve intacte. Mais sans elle, ma volonté serait inutile. »

J'esquisse un sourire presque triste mais sans aucun doute douloureux avant de me lever. Je faisais sans doute une erreur, mais parfois, j'avais aussi besoin de ce genre d'acte, peut être que cela mènera à rien et tant pis, j'étais aussi une femme égoïste après tout, mais il y avait une chose qui nous rendait semblable. Je ne pouvais pas  vraiment l'ignorer. Je ne savais pas ce que Darral lui voulait, mais je ne pouvais pas le laisser mettre la main sur une telle puissance, pourtant cela lui permettrait sans doute d’asseoir avec force les bases de son Utopie, mais si ce jour devait arriver, je savais que je le perdrais. Et avec lui cette petite flamme si importante. Je ne l'en haïrais que plus, je le détruirais par haine et par vengeance pour avoir fait de moi ce que je serais alors.

« Je ne sais pas quelle sera la tienne, mais tant que tu sera capable de la voir au travers l'opaque, alors tu retrouveras le chemin vers la Lumière que tu aime tant. Et lorsque tu seras sûre de cette corde, alors tu n'aurais plus peur. »

Je levais les yeux vers le ciel, les lunes rougeoyaient dans le reste de la Galaxie, bien visible, teinte de ce qui avait ravagé la planète.

« Trouve là avant qu'il ne te trouve. »

L'espoir, c'était donc de cela dont il était question... l'espoir ? Je n'ai jamais compris cette notion d'espérer quelque chose, de vivre tout en espérant un changement qui ne viendrait peut-être jamais. Je n'ai jamais espéré, je n'ai jamais eu cet éclat d'espérance dont elle semble attribuer le rôle essentiel de son équilibre avec la force. L'espoir n'a jamais fait partie de mon vocabulaire, c'est du moins ce que je pense au fond de moi. Si j'ai quitté ma famille, fugué pour ne plus jamais revenir, ce n'était pas poussé d'un sentiment d'espoir, mais bien parce que j'avais perdu foi et toute espérance en elle. J'ai pris la fuite sans me retourner, sans pourtant autant regarder devant moi. Me laissant emportant par le courant, peu importe qu'il soit bon ou mauvais, agréable ou désagréable. Je subissais la vie telle qu'elle m'accueille, survivant par nécessité, bien que j'ai tant de fois voulu cesser d'être et disparaître, m'endormir dans un éternel silence. Je n'ai pas vraiment de réponse à lui donner, pas vraiment d'argument pour la contrer ni même pour confirmer son point de vue. Mon regard se perd sur un point quelconque, un moyen pour moi de ne pas trop égarer ma pensée, les recentrer afin que je puisse m'interroger et donner du sens aux paroles de l'autre utilisatrice de la force. Ma respiration est calme, tandis que ma main droite tient toujours Ridenti avec une force qui ne semble pas s'amoindrir au fil des minutes. Je n'ai même pas la sensation d'une douleur musculaire ou d'une crampe qui serait en toute logique causée par cette tension de ma main sur le sabre. Je me demande soudainement, où va m'emmener cette histoire telle qu'elle est tournée. Me voilà seule à nouveau à cause de cet attentat, je ne me suis jamais fait d'illusion, ni d'espoir quant à l'idée d'avoir trouvé une vie agréablement. Je n'ai jamais espéré que cela continue afin de n'avoir jamais à regretter et d'en souffrir.

Pourtant, je regrette déjà la vie que nous avions, mes camarades, mon maître. J'ai fini par m'attacher à toutes ces personnes qui m'étaient alors étrangères. Des personnes gentilles, sages et parfois même un peu drôle. Je regarde Lucrèce de nouveau, elle qui est seulement à quelques centimètres moi. En effet, je m'étais assise à côté d'elle sans le moindre soucis, sans crainte et sans gêne. Je lui annonce alors : « Je n'ai jamais cru en l'espoir ! Cette notion ne m'a jamais effleuré l'esprit, j'ai toujours préféré agir plutôt que d'espérer une chose qui ne serait probablement jamais. L'espoir est un mensonge, une illusion à laquelle on veut croire pour se faire du bien mentalement parlant, pour rendre un semblant de vie plus agréable. Regarde dans quel monde nous vivons, les gens savent qu'ils vont mourir un jour, mais ils espèrent avoir plus de temps encore.... Vivre davantage, certain même fantasme l'immortalité. Mais ce n'est qu'un foutue mensonge, une illusion qu'on se fait à nous-mêmes. Tu peux autant espérer vivre aussi longtemps que tu veux, ça ne changera rien à ta finitude. » Mon regard est pénétrant et intrigué à la fois, je suis intéressée par sa réponse, je veux savoir ce qu'elle va me répondre. Puisque je le sais au fond, j'ai envie qu'elle me persuade avec succès que l'espoir est bel et bien réelle, qu'elle a bel et bien une raison d'être. « L'espoir n'apporte que la déception à mes yeux. » Rajoutais-je alors que mon regard se détache de nouveau d'elle. Le ton de ma voix était sec et froid, presque amer. Je peux sentir que ma phrase m'est restée au travers de ma gorge, je n'aime pas ce que je dis. Je ne veux même pas croire en mes propres paroles, mes propres croyances et convictions. Parce que je sais que je suis une fille qui n'a rien avec elle que le doute, en plus d'être dépendante de ses désirs et ses émotions.      
     
« Je veux détruire ce qui rend mon cœur si mal, même si je deviens un être qui ne ressent plus rien. » Crachais-je, tandis que ma main libre posée sur le rondin faisait pression sur celui-ci, écrasant quelques écorces au passage. « La mort est tellement plus facile que la vie. Peut-être devrais rejoindre mes frères et sœur. » On peut sentir l'ironie dans ma dernière phrase.

Je l'épingle d'un coup d'oeil moqueur. Vraiment ?

« Tu n'as jamais cru dans l'espoir...Intéressant point de vue, mais totalement faux. N'est ce pas l'espoir qui te pousse vers la Lumière ? N'est ce pas lui qui te pousse a me demander mon aide ? N'est ce pas lui encore qui t'inspire la force de me contrer même lorsque tu sais que j'ai raison ? Lui encore qui te pousse a croire en quelque chose de mieux ? Il y a de multiples espoirs Gamine et oui, certains sont brisés avant même de vivre et j'en sais quelque chose. Quant a vivre éternellement...Si il y a bien quelque chose que je n'espère pas, c'est bien une existence sans fin. »

Mon regard se perd un instant dans le vide lorsqu'elle continue. Oui, l'espoir devient une blessure éternelle parfois. Une déchirure qui ne veut plus guérir. L'espoir qu'il viendrait me chercher est devenue une haine sans nom, une colère sans fin, mais pour un espoir tranché il en naît un bien plus fort. Celui qui me hantait dorénavant était aussi tenu qu'un fil d'araignée, aussi fragile et pourtant, il demeurait, refusant de ce laisser corrompre, c'est cela qui amena un sourire plus sincère sans doute sur mes lèvres.

« Il est autant déception que renaissance. »

La suite fait naître mon rire combien même pouvait elle laisser entre voir l'amertume qui pouvait la ronger. Non ce n'était pas hilarant et pourtant, c'est un rire presque trop léger qui me traverse, roulant comme des perles de velours dans la forêt silencieuse qui nous entoure.

« Non Gamine, tu es sans doute beaucoup de chose mais pas lâche. La Mort serait une solution trop facile a tes yeux. Je l'ai aussi envisagé savais tu ? Parfois, je suis tellement épuisée, brisée même mais je me relève toujours. Je regarde mes mains tachées de sang et j'avance encore. Parce que j'ai un but et tant que je ne l'aurais pas atteint, je n'ai pas le droit de flancher, parce que je sais que sans ça, je serais définitivement perdue dans l'Obscur. Je me servirais de tous les pouvoirs que m'offre la Force pour atteindre ce but et je mourrais lorsque ce sera fait. »

Je pose une main sur ma hanche, penchant légèrement la tête tout en considérant son amertume. Sa peur avait un goût délicieux, je la sentais encore sous jacente a ses mots

« Regarde en toi et plonge profondément au cœur de ton âme, Gamine. Si tu veux les armes pour lutter contre ce qui te ronge, il faut les trouver au fond de toi. Se servir de l'obscur mais ne jamais le laisser se servir de toi. Parce que c'est ce que tu fais, tu abandonne ta conscience entre ses mains, tu lui laisse les pleins pouvoirs sur toi c'est ce qui rend ton retour si difficile. »

Il est difficile de contrôler une puissance qui possède une saveur si enivrante. Oui, très difficile, il est tellement plus plaisant de se laisser submerger et d'oublier la frontière entre le bien et le mal, de devenir ce que l'on hait le plus. Je ne suis pas parfaite, loin de là, j'ai fais des choses aussi innommables que belles mais je reste en paix avec une conscience qui n'est que tendue vers lui. J'accepte les plaies et le poison dans chaque cellule de mon corps parce que je ne peux faire autrement, parce que c'est là un chemin que j'ai choisis d'arpenter malgré tout. Sachant que la mort sera ma seule fin possible.

Je commence sincèrement avoir assez de cette conversation qui rend ma situation davantage tragique. J'ai clairement compris que je ne suis pas maître de mes émotions, c'est vrai. Ah quoi bon me faire comprendre que je ne suis pas non plus adepte de ce sentiment d'espoir. Je l'ai regardé sous toutes les facettes, je n'y comprends rien à cette notion. Pire encore, cela a tendance à m'énerver plus qu'autre chose, alors je ne veux plus en parler. Je me lève du rondin de bois, pour me remettre en face de Lucrèce lui attrapant ce qui ressemble à son col. « Tu as beau me le dire, je n'y comprends strictement rien à ce truc que t'appelle espoir. Je vais te dire pourquoi j'ai rejoint les Jedi... Ce n'était pas dû à l'espoir, je n'ai jamais rien espéré de ma mère, pourquoi espérais-je quelque chose autre part... Si j'ai rejoint l'Ordre, c'est seulement parce que je me suis abandonnée à eux, à leur idéaux, leur semblant de vie utopique. Une illusion qui m'allait pour un moment, puis après j'ai fini par comprendre et réaliser ce dont il essayait de m'enseigner. La lumière je ne l'ai pas cherchée, c'est elle qui m'a trouvé toute seule... Si je désire ton aide, seulement que je m'abandonne à toi, parce que je ne ressens rien d'autre que le désespoir... Et non l'espoir ! » Je lui avais crié ses mots, pourtant c'est contre moi-même que je criais intérieurement. Je ne la lâche pas, la tenant avec la même férocité que celle que j'use sur mon sabre laser. Une nouvelle fois ma tête tournait et fourmillait de multitude d'émotion, dont la colère que se démarrer largement des autres. J'avais envie de me défouler, de frapper quelque chose pour soulager ce poids qui fait pression sur ma conscience. Je la lâche avec rage en reculant tout balançant mes bras en l'air et je rajoute, toujours sur le même ton colérique. « Si je regarde en moi, je sais qui je verrais. Non. Je n'ai même pas besoin de plonger en moi pour ça. »

Dis-je, je pointe mon doigt dans une direction, semblant indiquer quelque chose de l'index, mais il n'y a rien que l'autre femme puisse voir, pourtant que moi je voyais avec grande clarté. « Il semblerait que j'ai à mes côtés un personnage de mon passé qui refait surface. Plonger en moi, mais pour y voir quoi ? La vile créature que j'ai été, cette apprentie Sith qui pour nourrir sa corruption a été forcée de dépecer ses propres cousins et cousines. Oh oui, qu'il est beau cet espoir ? Mais l'espoir de quoi ? De quoi veux-tu que j'ai espoir ! Il ne me reste plus rien... Rien ! Yavin est devenue un cimetière ! La seule chose que je veux, c'est d'oublier ma peine, l'éteindre, ne plus rien être qu'une coquille vide, vide d'émotion. Je ne veux pas d'espoir qui pourrait encore me faire souffrir davantage ! » Je n'aime pas sa façon de penser, même si j'imagine que sa vie a été dure pour elle aussi, je ne peux m'empêcher de penser que finalement... Ca été facile pour elle de le gérer. Je finis par poser ma main gauche sur mon visage sans calmer le tourbillon qui m'enflammait, je fais revenir celle-ci dans ma chevelure. Faisant les cent pas à la suite, des va-et-vient, réflexes d'un personnage du passé. « Regarde-moi... Je ne suis rien d'autre qu'un fragment de moi-même, un bout de quelque chose qui s'est brisée il y a déjà bien longtemps. Ce n'est pas de l'espoir dont j'ai besoin Lucrèce... J'ai besoin... J'ai besoin d'être effacée. » Dis-je avec ironie, je me mets à rire, d'un rire presque fou à la suite. « Alors, tu vois bien que je suis une lâche, je n'ai même pas le courage d'affronter mes propres sentiments. Laisse tomber tes discours avec moi, fais-de moi ce que tu veux. Je t'intéresse, non ? Alors, utilise moi ou tue moi, dans les deux cas, je trouverai une forme de paix. » Je lève les bras à la suite pour montrer ma soumission, je ne voulais plus l'entendre parler d'espoir, ce n'était pas ce que je recherchais.

Il y a tant d'amertume, tant de haine aussi. Un désespoir aussi noir que le vide en elle. Elle serait si parfaite pour l'Obscur. Je le sens. Pourtant, elle n'a pas basculer bien au contraire. Et c'est là sa contradiction. Une dissonance dans son discours et sa façon d'agir. Elle se hait elle même, voir peut être plus. Son éclat me laisse froide, du moins en apparence, pourtant je l'écoute me parler, j'entends tous les mots. Je l'entends me demander de la tuer.

« Alors deviens ce que tu hais, Gamine. Si tu n'es pas capable de te relever, laisse toi sombrer. Après avoir rejeté ton enfance et ce que ta naissance t'a donné. »

J'esquisse un sourire, glacial et en même temps, d'une douceur ineffable. Comme une peinture en recouvrant une autre. Une image qui laisse entrevoir une autre image.

« Pourquoi me demander mon aide si tu n'es pas capable de redresser la tête ? Oui te reconstruire est bien plus difficile que te détruire et pourtant je ne t'ai pas vu te jeter sur mon sabre avec le désir de mourir. La lumière t'a choisis. Pourquoi ? Penses tu qu'elle aime les cas désespéré ? Elle a été te chercher au plus profond des ténèbres, serait ce pour rien ? Oui tu es désespérée. Comme je le fus mainte et mainte fois, lorsque j'ai compris que l'Ordre ne viendrait pas me chercher, lorsque j'ai compris qu'il m'avait abandonnée. Je l'ai été en perdant ce que j'avais de plus précieux. Je l'ai été en tranchant des vies sur un simple ordre. Je l'ai été en me donnant a ce que je haïs le plus. Je suis empoisonnée jusqu'au sang, jusqu'à l'âme. »

Je plisse doucement les paupières, ne laissant paraître qu'un rai d'azur délicat mais doté d'une puissance sans nom.

« Pleure. Crie. Hurle et frappe. Mais ne désire pas le néant, car le prix qu'il réclame est d'une immondice dans nom. »

Je me plantais sur son chemin, stoppant ses aller venues. J'attrapais son menton d'une main, il n'y avait pas de violence dans mon geste, très étrangement. Pas de brutalité non plus d'ailleurs.

« Le désespoir n'est qu'une étape, Gamine. Un obstacle qui paraît insurmontable et ce n'est pas le premier que tu affronte. Te sens tu faible et misérable Gamine ? »

L'éclat azuré de mes iris ne peut totalement se défaire des ombres qui naviguent sans cesse dans leur creux et je les plonges sans vergogne dans le sien. Il y a tant de douleur que là maintenant, elle me laisserait la tuer sans s'y opposer. Je pourrais le faire sans frémir, me délestant de la culpabilité, des regrets et des remords. Je pouvais le faire parce que j'aimais le mal autant que je le haïssais. Mais je ne le ferais pas. Je veux la regarder grandir. D'un côté ou de l'autre. Lumineuse ou ténébreuse. Je la regarderais.

« En colère aussi, une rage insidieuse qui provoque la souffrance ? Pleure Gamine avant de t'étouffer toi même. »

Je suis folle, folle d'avoir cru que je pourrais, moi, échapper à mes origines. On est ce qu'on est, c'est la dure réalité. Un Hutt n'aura jamais la beauté d'une Twil'ek qui le veuille profondément ou non. Je suis née Sith, pire encore, j'ai des gènes des vrais Sith en moi, comment ai-je pu croire que je serais autre chose qu'une Sith. La colère me réchauffe, me fait oublier le froid tout comme il me fait oublier ma propre raison. Folle je suis, de vouloir me donner à la mort, alors que je la crains plus que tout, malgré le fait qu'il n'y ait pas la mort, mais la Force. On aura beau me le dire, je n'arrive pas vraiment imaginer quelque chose après la mort qu'un simple néant. Alors que je fais les cent pas, voilà que la voix de Lucrèce redevient perçante, pénétrant à nouveau mon esprit. C'est de ma faute, je suis tellement faible, incapable de maîtriser mes émotions, incapable d'être insensible à.... à ce sentiment qu'elle me fait éprouver, qu'elle me procure. Elle s'arrête devant moi, bloquant alors mes mouvements de frustration qui conditionnent ma rage, l'amplifient. Elle m'attrape le menton, je suis alors l'espace d'un moment troublé par ce geste qui me donne une impression de délicatesse. Le fait-elle exprès ? Exprès de me rappeler Mère ? C'est... c'est si désagréable, pourtant agréable à la fois. Ce n'est pas tant l'intérêt qu'elle me porte qui me trouble, car je l'aurai été de Luke et des autres dans un sens. Non. Lucrèce possède ce petit truc insignifiant qui me torture l'esprit, mes tortures de nostalgie. Son geste presque délicat, rend davantage ses paroles convaincantes. Des paroles qui en plus mettent à nue ma propre, elle me découvre de mon manteau qui me sert de barrière émotionnelle. Ses yeux bleus, dévorant les miens, les dominants de son regard ténébreux et glacials. Lorsqu'elle me dit dans sa dernière phrase de pleurer avant que la rage ne m'étouffe, c'est comme si...

C'est comme si le dernier verrou qui bloquait tout ce qui débordait en moi, avait finalement cédé comme ayant reçu enfin la permission. Ce fut alors d'abord mon corps qui pleura, de nouvelles larmes coulant sans même que je ne m'en rende compte. Puis, enfin à nouveau je gémis d'un gémissement silencieux. Et je pleurais encore, mais cette fois non pas de larme causée par le déni, mais plutôt l'acceptation. Mon sabre tombe sur le sol avant d'être suivi par mes genoux, je rejoignis mes mains sur mes épaules. Et je pleurai, jusqu'à ce que mes yeux ne me fournissent plus assez de larmes... Allée savoir combien de temps était passée, car lorsque mon cœur redevint paisible, vidé de ce qui le rongeait, l'aube avait au loin dévoilée sa clarté. Ma vue était encore flou, obstruée par quelque goutte de larme qui perlait au bord de mes yeux. Mais mon regard se lève toutefois vers l'aube qui étrangement, accompagne ici ma purge et ma renaissance. Mes yeux se posent à la suite sur Lucrèce, la fixant dans un silence significatif. Je ne me lève pas, toujours sur mes genoux engourdis. « Que dois-je faire maintenant ? » Dis-je d'une voix fragilisée auparavant par mes pleures. La question est sincère, que devais-je faire maintenant ? Je me sens vide comme je le souhaitais, mais je sais que ce vide est temporaire que le chaos reviendrai, je le sens au plus profond de moi. Oui, que dois-je faire maintenant ? Je baisse le regard pour porter attention à mon Sabre, relique de mon passé. Mon passé... A quoi bon, le lui cacher ? « Mon nom... » Commençais-je, ramenant mon sabre près de moi pour le poser contre ma poitrine. « Mon nom est Alura Visiris. »

Si elle s'écroule, je reste debout. Parce que je l'ai toujours été. Parce qu'il n'y a qu'ainsi que je vis auprès de lui sans jamais me briser. Parce que je ne plie jamais un seul genoux au sol. J'entends les sanglots amers et ils me rappellent ceux que j'ai versé voilà des années. Des années qui on vu tant d'espoir mourir devant la réalité de mon existence. Je lèvais les yeux vers le ciel. Il était aussi noir que mon cœur, aussi sombre que mon âme. Mais, comme un cycle immuable, l'aube embrasera l'horizon. Sa voix me sort de mes pensées et je détourne le regard du ciel. Il existe un sourire étrange sur mes lèvres, comme une condamnation qui se veut rédemption.

« Maintenant ? Tu relève la tête et tu avance, Gamine. »

Parce qu'une coquille vide se doit de se remplir. De haine ou d'espoir. D'amour ou de haine, elle ne peut rester vide éternellement. C'était ainsi. Je passai une main dans mes cheveux lorsqu'elle continua me révélant un nom que je connaissais et qui lui attire un coup d'oeil insondable.

« Visiris ? »

Ma bouche s'incurva doucement, comme une moquerie qui ne s'adressait pas à elle. Vraiment pas. Cela la rendait encore bien plus intéressante à mes yeux. La matriarche Visiris n'était pas un pion facilement manipulable, le serait elle que je ne m'y frotterais pas réellement. Mais avoir sa fille ou un membre de sa famille sous les yeux, perdue entre lumière et ténèbres...Il y avait quelque chose de terriblement cruel dans le destin, c'était certain.

« Voilà une hérédité que même moi je voudrais fuir. »

Mon com-link se mit a vibrer avec quelque chose d'insistant mais je l'ignorais, c'était sans aucun doute le pilote de la navette qui nous avait emmener ici. Il partirait sans moi, je saurais me débrouiller. D'ailleurs, je le sortis d'une de mes poches situées sur mes cuisses et l'observait un instant, pensive. Un sourire mystérieux joua un instant sur mes lèvres.

« Il est temps de partir, Alura. Tu ne peux pas rester ici plus longtemps et moi, je ne peux pas tarder avec un excès de zèle. »

Je lui lançais mon com-link avec un rien de désinvolture.

« Prend le et lorsque tu ne sauras plus mettre un pied devant l'autre, appelle moi mais soit prête a en subir les conséquences. Je te regarderais grandir, Gamine et ce sera sans doute très intéressant. »

Oui vraiment, a condition que Darral ne lui mette jamais la main dessus. Si jamais il venait a savoir quel rôle j'avais pu jouer en laissant sciemment échapper une proie qu'il convoitait....J'eus envie de rire. Il ne me ferait rien que je ne sache affronter de toute façon..Et j'étais depuis longtemps prête a payer un prix immonde pour mon attachement à lui. Mais elle, cette gamine perdue n'en faisait pas partit. Mais avant de disparaître, je lui fis un cadeau :

« Il te cherchera. Celui dont tu as aperçu la silhouette. Il te cherchera et il réussira. D'ici là Gamine, prépare toi à sa venue parce que j'aurais échoué. »

Ma main franchit la distance qui nous séparait et j'effleurais sa joue du bout de mes doigts, comme une caresse glaciale mais aussi douce qu'un enfer.

Il était temps pour moi de retourner au cœur d'un enfer que j'aimais malgré tout.

« Au revoir Gamine. »

Et je disparus, aussi simplement qu'un mirage qui s'éfface.