- Je vous demande pardon ? La chiss relu l'ordre de mission, les sourcils froncé, avant de lever un regard flamboyant vers son Capitaine.
- Un problème Lieutenant ? Il parvenait à prendre un air sévère presque convainquant.
- Oui Capitaine, et pas un petit. Sauf votre respect…
- Ça commence mal. Coupa le Capitaine Keith.
- A quoi vous vous attendez ? Il m'accuse d'être responsable d'une erreur de repérage, responsable de la perte de son équipe, et je suis censée approuver une mission en duo, lui et moi ?
- Ça te pose problème ?
- A moi, non, à lui… Elle soupira, abandonnant son ton formel. C'est trop tôt Lupren. Beaucoup trop tôt.
- Je sais Triss… Mais on manque de pilote, on manque d'officier, et on manque d'équipes soudées. Alors vous allez me faire le plaisir de bosser ensemble, de réussir et que de mettre cet incident derrière vous. J'ai besoin de vous deux.
Ils se défièrent encore du regard, quelques instants. Le Capitaine Keith avait l'air fatigué, plus vieux que son age, il n'était pourtant pas beaucoup plus vieux qu'elle, mais la récente perte d'un escadron presque au complet avait été un coup dur. Il n'était pas d'humeur à discuter, c'était pourquoi il n'écouterait pas l'avis du Lieutenant Triss. Pas aujourd'hui. Cette dernière le vit et, même si elle pensait qu'il fallait laisser encore du temps au Capitaine Vel, elle devait reconnaitre que Keith avait raison.
- A vos ordres. Finit-elle pas dire, prenant le databloc qu'il lui tendait toujours.


Triss était restée dans la soute depuis le départ. Elle avait prétexté vouloir s'assurer que tout était en ordre mais cela ne lui avait pris que quelques dizaines de minutes pour une vérification bien plus soigneuse que nécessaire. Elle était à présent assise sur une caisse avec pour seule compagnie son datapad où elle relisait pour la cinquième fois les données dont ils disposaient sur le signal de détresse vers lequel ils se dirigeaient. Rester enfermée ici était déprimant et elle savait bien qu'il faudrait un moment donné qu'elle cesse de ménager Kenan, d'autant qu'elle s'ennuyait ferme et qu'ils devraient coopérer une fois arrivés, mais elle le laissa encore un peu.

Le voyant lumineux témoignant du verrouillage de l'accès au cockpit passa au vert, elle se leva, faisant aussitôt mine de contrôler les équipements de survie de la soute sur son datapad, son petit jeu était d'ailleurs très naturel et tout aussi naturellement qu'elle tourna la tête vers Kenan, l'air vaguement surprise. Lui aussi jouait, d'ailleurs, elle le constata à son air parfaitement désinvolte quand il l'invita à le rejoindre à l'avant. Elle jeta un dernier coup d'œil à son pad et lui adressa un signe de tête.

- C'est vrai. J'ai fini ça, j'arrive.

Ni l'un ni l'autre ne semblait vouloir relever combien leur attitude était fausse. Elle marqua encore quelques secondes avant de se rendre dans le cockpit. Elle l'entendit alors, dans un murmure, une excuse. Elle passa à côté de lui et posa brièvement sa main sur son épaule.
- Je le suis aussi. Elle s'installa en silence sur le fauteuil du copilote.

Elle n'était pas responsable, ce n'était pas pour cela qu'elle s'excusait. C'était plutôt pour sa réaction, la seul qu'elle était capable d'avoir dans pareille situation, la seule qu'elle avait eu quand Kenan avait hurlé sur elle ses accusations : sa plus grande froideur, ne lui répondant que d'un glacial "Tu as fini ?" devant ses cris, alors qu'il venait de perdre ses amis. La seule réaction qu'elle parvenait à avoir quand elle-même était touchée profondément, quand elle-même souffrait d'avoir perdu toute une équipe. C'était dans sa nature, mais ça n'était pas celle qu'attendait un humain quand la mort frappait. Elle laissa son regard se perdre dans les lumières de l'hyperespace.

- Ça n'aurait pas dû arriver. Triss se décida à briser le silence. - J'aimerais pouvoir dire que si j'avais été responsable de cette surveillance ça ne serait pas arrivé, mais des supposition ne changerons pas ce qui s'est passé. Poursuivit-elle d'un ton qui lui était inhabituellement doux. - Avoir un responsable à blâmer aurait peut-être rendu les choses moins dure à accepter, mais il n'y en a pas… Ca n'aurait juste pas dû arriver. Elle eut un soupir discret, à elle aussi, ça lui était arrivé de perdre toute une équipe sous ses ordres. Là aussi, dans une opération si banale qu'aucun n'aurait dû être même blessé.
- Comment va Nata ? Demanda-t-elle, tournant la tête vers le pilote.

Leurs regards, enfin, cessèrent de s'éviter quand il fut question de Nata. Triss sentit son cœur se serrer en pendant à la gamine, les blessures qu'elle traînerait dès lors seraient infiniment plus dévastateur que des blessures physiques, celles de l'âme ne pouvaient se régler par un bain de bacta et une bonne convalescence. Il n'en fallait pas plus pour mettre un terme précoce à une carrière de pilote, combien, comme elle, ne pouvaient plus piloter de nouveau, le traumatisme les reprenant violemment chaque fois qu'ils se trouvaient aux commandes. Elle était jeune, trop jeune pour vivre ça. Tout comme eux.

- Nous n'étions pas beaucoup plus âgés au moment de la bataille de Yavin... Murmura-t-elle d'un ton sombre.

Elle avait déjà vu des affrontements avant Yavin. Elle servait dans l'armée chiss depuis l'age de 17 ans et avait passé presque toute sa carrière sur de la défense des frontières : elle avait très vite baigné dans les combats. Mais rien n'était comparable au sentiment d'horreur qu'elle avait ressenti lorsqu'elle avait vu l’Étoile Noire exploser au loin, quand la déflagration et son onde de choc avait secoué le destroyer où elle servait alors comme simple petite Enseigne, recevant les communications et perdant d'un coup le contact avec la base. Quand elle avait été saisie par le poids des milliers de personnes qui soudain n'étaient plus. Pourtant, contrairement à la perte de l'Executor, quatre ans plus tard, elle ne connaissait personne à bord. Elle sentit sa mâchoire se serrer, involontairement. Là aussi, elle en avait entendu les dernières communications, jusqu'aux ultimes cris, des voix qu'elle avait connu. Et même elle, ces souvenirs la hantaient, parfois.

Mais cette opération ne laisserait pas de séquelles que chez la jeune Nata, Triss voyait se confirmer combien Kenan avait, lui aussi, été affecté. Combien il se flagellait, s'en donnait l'entière responsabilité. Il était vrai qu'un capitaine conservait une certaine responsabilité dans ces cas-là, mais pas toute, il aurait pu, au mieux, limiter les dégâts. Lui et Nata s'en étaient sorti vivants, ça aurait pu ne pas être le cas. Elle secoua légèrement la tête, lentement.

- Les survivants ont souvent tendance à se sentir coupable. On ne refera rien sur des suppositions, mais il y a une certitude : d'autres choix de ta part auraient pu avoir pour conséquences que personne n'en revienne... Elle repoussa de son esprit toute idée de ce qu'elle aurait ressenti, s'il n'était pas revenu. C'était peut-être une vision égoïste et elle connaissait certains des disparus, à divers niveau, mais aucun autant que Kenan. Si lui n'en était pas revenu... Tu es revenu, Nata est revenue. Compte tenu des forces qui vous sont tombés dessus, c'était inespéré, et pourtant, tu es là, ça, je veux bien t'en accorder l'entière responsabilité.

Elle joua distraitement avec l'ordinateur de bord, consultant, tantôt le minuteur avant la sortie de l'hyperespace, tantôt la carte de la route galactique donnant une approximation de leur emplacement, tantôt les données de navigation faisant défiler des mesures aussi variées que les champs gravitationnels, les radiations ou les frottements des micro-impacts. Elle avait de la peine pour son ami et l’empathie était un sentiment qu'elle tenait généralement éloigné d'elle, c'était une aptitude qui ne lui était pas utile d'un point de vue strictement martial et, dans certains cas, une dangereuse faiblesse. Mais elle restait pourtant douée d'empathie et pour le moment, elle pouvait se payer le luxe de laisser son esprit accepter de partager ces sentiments. Sous ses traits neutres et son visage impénétrable, ces yeux rouges qu'aucune larme ne semblait jamais pouvoir troubler, se trouvait pourtant un esprit sensible qui ne pouvait que souffrir quand un ami cher vivait ce que Kenan vivait. Elle avait déjà perdu une équipe. Elle connaissait cette douleur. Seul le temps et beaucoup de recul apaisait ces peines. Mais ils étaient des soldats, lui aussi s'en relèverait, la jeune Nata aussi d'ailleurs, Triss en était certaine.

- J'aimerais te dire de prendre le temps qu'il faut pour faire le point sur tout ça. Malheureusement, le temps manque. Regretta-t-elle, le regard perdu dans les lignes de l'hyperespace.

Alors que le silence s'installait, que les deux impériaux sombraient dans leurs méditations respectives, le signal du tableau de bord retentit, annonçant leur arrivée prochaine. Triss attacha ses sangles. Voilà qui clôturait pour le moment leur conversation, même si la chiss aurait aimé creuser la question : donner tout son temps à l'Empire, elle avait ressenti comme une tension dans sa voix, ce qui pouvait se mettre aisément sur le compte du choc encore récent, mais il serait bon qu'elle en sache plus long sur ce qu'il voulait dire. En soi, ce n'était pas faux : tout élément de l'armée impériale se dévouait corps et âme à l'Empire, beaucoup étaient embrigadés dès leur plus jeune âge, mobilisés de force, contraint, d'autres étaient volontaires, comme Triss l'avait été, mais de ce qu'elle savait de Kenan, lui n'avait jamais eu le choix. Tout comme Kathleen… Aussi, Triss préférait en discuter avec lui, dès qu'ils en auraient l'occasion, plutôt que de le voir s'effacer derrière ses ressentiments, jusqu'à ce qu'il soit trop tard.

La pression du ralentissement resserra ses sangles sur elle, les compensateurs de ces petits appareils étaient parfois un peu faibles et, même dix ans plus tard, il lui arrivait de regretter le confort des appareils chiss. La sensation disparue aussi vite qu'elle n'était apparue et, quand les lignes des étoiles se stabilisèrent devant ses yeux, Triss pu découvrir l'appareil dont provenait le signal de détresse. Sa forme était celle d'un destroyer, trapu, à l'avant triangulaire, plat surmonté d'une passerelle de commandement, oui, c'était bel et bien un destroyer, mais un vieux modèle. Triss identifia un modèle Venator, c'était la première fois qu'elle en avait un de visu, et pour cause, ces modèles dataient d'avant l'avènement de l'Empire. A l'époque où ces modèles étaient encore en circulation, elle en était encore à apprendre à se tenir sur ses deux pieds, au fin fond des Régions Inconnues. L'officier consulta les bases de données pour confirmer sa pensée et afficha tout ce qu'elle put sur ce modèle, puis se saisit des appareils de communication pour tenter d'identifier le matricule de l'appareil. De même, elle lança un scan complet sur l'état du destroyer, le balayage commença alors qu'ils se rapprochaient de la baie d'amarrage.

Les senseurs achevèrent leurs scans alors que Triss enfilait l'équipement pour sortir. Elle revint à son siège et étudia les données en silence. C'était surprenant, le matériel était endommagé, c'était visible même de l'extérieur, mais pourtant ils avaient captés certaines sources d'énergie. Pour en savoir plus, ils étaient forcés d'y entrer avec les risques que cela comportait. Son coéquipier, tout comme elle, mit l'accent sur la prudence. Ça risque d'être le chaos là-dedans. Rapporta-t-elle à Kenan. Beaucoup de dégâts, la coque est percée par endroit, on risque d'avoir des poches d'air ou de pression résiduelles tout comme des zones sans gravité et dépressurisées. N'oublions pas les câblages de rappel.

Elle prit place dans le sas et activa la ventilation de son casque alors que la combinaison se collait à elle, signe que la pression diminuait à l'extérieur pour ne pas les éjecter hors de leur vaisseau, quand le sas s'ouvrirait. Triss entra la première dans le vaisseau fantôme, sentant sous ses pieds le sol comme distant, la gravité fonctionnait ici, dans une moindre mesure, mais présente. Dans l'obscurité, elle alluma sa lampe frontale et balaya les lieux : c'était un pont d'amarrage mineur, une entrée de service, pour ainsi dire. Le sol était presque intact, dénué de crevasses, et sa lumière portait jusqu'aux murs à quelques mètres de distance. Si les plans que j'ai récupéré sont corrects, on atteint le tunnel d'accès à la coursive principale, par ici. Dit-elle en désignant une ouverture plongée dans les ténèbres. Il y a l'artère principale au centre qui mène aux quartiers de commandement et l'ascenseur pour la passerelle, mais on a plutôt intérêt à emprunter les accès de service si on ne veut pas de mauvaises surprises avec des pertes d'énergie. Sinon il reste les coursives périphériques, si jamais la centrale est obstruée. J'aurais tendance, par contre, à commencer par les salles moteurs à l'arrière du bâtiment, qu'en pense-tu ?

Derrière la visière sombre de son casque, les yeux de Triss luisaient dans les ténèbres ambiantes. Kenan approuva sa suggestion de commencer par la salle des machines, ajoutant qu'ils y trouveraient peut-être la raison du signal de détresse.

- C'est si joliment dit. Remarqua la chiss, amusée mais dénuée de toute moquerie.

Parfois le pilote la surprenait avec des tournures presque lyriques, lui qui donnait plus volontiers l'image d'un gars énergique, volontaire, pas toujours des plus subtil mais bon copain, en tout cas, on ne l'imaginait pas forcément poète. Ils se mirent en route avec prudence, au travers des coursives. Bientôt, ils virent des traces évidentes de combat, ce n'était pas un combat spatial uniquement qui avait mis l'appareil dans cette situation, mais également des attaques internes, bien que rien ne leurs permettait de connaitre l'historique des évènements par ces simples indices. Les corps portaient des armures de soldats clones, contemporains donc au modèle Venator. Cela faisait donc bien 30 ans que le vaisseau dérivait dans l'espace, les corps étaient restés là depuis, ce qui indiquait qu'il n'y avait plus eu d'activité réelle depuis : la première chose faite en cas de prise d'un vaisseau était de le nettoyer. D'ailleurs, la conservation des clones indiquait de manière claire que peu d'oxygène avait dû circuler ici ces trois dernières décennies.

- Ce sont des droides de la Fédération du Commerce ? Demanda-t-elle, pas certaine de reconnaitre les modèles.

La créature étendue parmi les clones, cependant, n'avait rien d'humain ni de difficile à identifier. Il fallait ne rien connaitre aux espèces galactiques pour ne pas reconnaitre un Trandochan quand il s'en pointait un.

- Effectivement, s'il y a ici encore quelque chose capable de venir à bout de ces lézards… On ferait mieux de ne pas retomber dessus.

La tension était palpable, même si les deux officiers étaient entrainés au combat, ça n'était pas comparable à la culture de la guerre présente chez cette espèce, ce qui en faisaient d'excellent chasseurs de prime et des combattants hors pair, sans aucune pitié ni mesure. Triss n'aimait déjà pas beaucoup l'idée d'en croiser un, mais alors de croiser quelqu'un susceptible d'en battre un… Elle n'était pas du genre à se laisser effrayer, d'ailleurs elle reprit son avancée sans montrer le moindre signe de crainte, mais sa vigilance était accrue.

Ils entrèrent dans la salle des machines et la première chose que Triss remarqua, ce fut qu'il y avait eu de l'activité récemment. La pression semblait plus proche d'une pression atmosphérique, elle sentit les fibres de son équipement pressurisé se desserrer, l'air était peut-être même respirable, mais ça, elle n'allait pas prendre le risque d'enlever son casque pour le vérifier.

- Le courant a fonctionné il y a peu de temps, l'endroit est pressurisé et j'ai même l'impression que ces machines ont tournés il y a quelques jours maximum. Il y a de la poussière dans l'air.

Elle avisa un panneau de control à l'écran endommagé mais en l'activant, malgré la fissure et la lumière vacillante, il était en état de marche. Il y avait de l'énergie dans cette épave !

- S'il y a du courant, on pourra peut-être récupérer les dernières données de vol. Je n'ai pas l'impression qu'il y a eu des affrontements ici, ça ressemble plutôt à des dégâts d'un impact extérieur. Ce vaisseau a dû être bombardé avant d'être abordé. Tu as trouvé des choses intéressants de ton côté ?

Comme un ennui n'arrivait jamais seul : a peine Kenan eut-il annoncé ses conclusions sur les présences dans le vaisseau que ce dernier se mit en marche. Les moteurs se mirent à gronder, le sol à trembler, à se demander même comment cette épave pouvait encore espérer se mouvoir. Dans tous les cas, ce n'était pas de bonnes nouvelles pour le duo d'impériaux coincés au cœur de ce traquenard.

- Hum… Ça risque de poser problème. Commenta Triss avec son calme naturel.

Elle balaya du regard la salle des machines dont le grondement devenait assourdissant, heureusement les communicateurs intégrés à leurs casques permettaient à Triss et Kenan de communiquer malgré le vacarme. Elle restait néanmoins surprise que l'ensemble ne se fut pas encore disloqué.

- Si on passe en hyperespace je ne parierais pas beaucoup sur notre survie. Ponctua-t-elle en se dirigeant vers la sortie.

Leurs chances étaient déjà plutôt mince et surtout avec la découverte des droïdes et l’hypothèse terriblement cohérente de Kenan. Elle s'approcha de la porte et s’immobilisa, dans le couloir, elle avait clairement entendu un son métallique d'impact sur le sol des coursives. Des bruits de pas. S'il s'agissait de droïdes assassins comme ceux dont ils avaient retrouvés les débris, alors ils ne pouvaient sortir à découvert.

- Quelque chose arrive dans le couloir. Ça semble métallique, plus d'un je pense, dur d'entendre distinctement. Si on fait exploser les moteurs, la retraite s'annonce difficile. D'un autre côté... D'un autre côté, ils pouvaient difficilement rester ici avec le risque omniprésent que ce qui était aux commandes actuelles de cette épave ait la folie de tenter une accélération de type hyperspatiale. Si on les attend ici, on aura des couverts. Ce qu'il n'y aura pas si on sort. Sinon on peut se planquer et espérer qu'ils n'entreront pas. Sinon... ce n'est pas une issue de secours là-bas ?

Elle s'éloigna de la porte, son blaster néanmoins déjà en main, pour s'enfoncer vers le fond de la salle où elle avait aperçu une ouverture. Aucune idée de où ça peu mener. Tu en dis quoi ? On tente le combat ou on se casse ? Elle débloqua l'accès et y jeta un regard, se localisant dans l'ensemble du vaisseau. Ça pourrait être un tunnel de maintenance et il semble aller en direction de l'avant. Sur un modèle Interdictor ou Victory je pourrais affirmer qu'on pourrait rejoindre le pont d'envol. Mais là... Elle haussa les épaules pour avouer son ignorance, ce modèle de vaisseau lui était bien trop inconnu pour qu'elle fasse des rapprochements avec les croiseurs plus récents.

Le choix ne leur fut cependant pas laissé car avant même que les possibles assaillants ne soient en vue, un réacteur mineur siffla, une alarme hurla et laissa tout juste le temps aux deux impériaux de se jeter dans le tunnel, de refermer le sas et de courir avant que la déflagration ne secoue le sol. Triss perdit l'équilibre et se rattrapa à ma rambarde, les dents serrées et s’efforçant de rester calme. Où que ça mène... on a plus le choix. Au moins pour faire exploser ce truc, ça se fait très bien sans nous. Mission de routine tu parles ! S'exclama-t-elle en se jurant que Lupren allait en entendre parler, de ses idées tordues. Tu vas bien, pas blessé ? S’enquit-elle en examinant Kenan.

Aucune blessure du côté de Kenan non plus, Triss le constata avec un soulagement discret alors qu'ils continuaient leur route, la chiss écoutant son ami fustiger leur Capitaine et sa "simple mission d'exploration".

Nous sommes donc bien d'accord, c'est entièrement de la faute de Lupren. Répliqua la chiss avec un sourire en coin indiquant bien combien leur Capitaine allait prendre pour son grade quand ses deux amis rentreraient.

La colère de Kenan semblait sincère, cependant, là où Triss ne ressentait qu'un calme vaguement teinté de contrariété et d'inquiétude. Il n'était pas dans sa nature de se laisser aller à la rage ou la rancœur, de toute façon Kenan en règle générale s'emportait bien assez pour deux. C'était peut-être aussi pour ça que leur amitié si incongrue fonctionnait pourtant si bien, ils s'équilibraient, lui, franc et sanguin, elle polaire et impassible.

Ils étaient arrivés à un accès via un escalier métallique, Triss écouta les estimations de son coéquipier tout en hochant lentement de la tête. D'autant que si la soute est intacte, c'est probablement l'un des endroits où l'on risquerait le plus de faire des mauvaises rencontre. Dit-elle en réfléchissant à haute voix. L'heure n'était pas à l'exploration mais bien de trouver un moyen de se sortir de là, tant pis pour les données de navigations : ils retrouvaient leur appareil, au mieux laissaient une charge explosive bien placée sur cet amas de métal, et bon vent. Peut-être même qu'ils n'auraient pas besoin de faire tant d'effort. Ils empruntèrent l'escalier branlant et grinçant avec précautions, montant dans les étages supérieurs.

- Si on va trop haut, on risque d'atteindre les quartiers d'équipage. Pas très utile en ce qui nous concerne. Dit-elle en s'éloignant des escaliers dont la rotation avaient troublés sons sens de l'orientation.

Elle s'immobilisa, voyant le signe de Kenan avant d'entendre les sons qui l'avaient alertés. Non loin d'eux, des voix s'exprimaient dans un dialecte clairement saurien. Elle se camoufla dans l'ombre, seuls ses yeux presque clos la trahissaient alors qu'elle aussi tendait l'oreille. C'était des trandoshans, elle se concentra et faillis bien sursauter en entendant la voix de Kenan comme s'il était contre elle : le communicateur de son casque.

- Des bribes, il était question d'intrus, de moteurs et de droïde… Je n'arrive pas à déterminer si nous sommes les intrus ou s'ils blâment des droïde pour l'explosion des moteurs. Dit-elle, pensive. Dans le doutes, il me semble prudent de considérer qu'ils nous traquent. Ajouta-t-elle d'un ton parfaitement serein.

A son tour, sa main vint chercher son blaster dont elle ôta la sécurité et régla sur une puissance assez haute pour mettre une créature de la masse d'un trandoshan hors d'état de nuire.

- Suivons-les, s'ils nous cherchent leur premier réflexe devrait être de nous chercher précisément là où nous voulons nous rendre : vers un échappatoire. Murmura-t-elle.

Cette espèce formait des chasseurs naturels et le premier réflexe de chasse était d'anticiper sur la volonté de ses proies. Sauf que les proies en question savaient qu'ils chassaient les chasseurs, et étaient armés, entrainés et bénéficieraient, en cas de problème, d'une fraction de seconde liée à la surprise. Elle se glissa à leur suite, en silence, se tapissant dans les coins des coursives tout en faisant signe à Kenan pour lui indiquer quand il pouvait suivre, toujours en tenant son blaster prêt à tirer, au moindre danger.



Ils n'allèrent pas bien loin. Après quelques dizaines de mètres, une ouverture vitrée laissa suffisamment de visibilité pour leur permettre de s'orienter, assez pour constater qu'ils se dirigeaient vers l'avant du vaisseau, les ponts de vol n'étaient pas du tout dans cette direction. Les trandoshans qu'ils suivaient s'en retournaient vers la passerelle ou les stocks d'arme, en tout cas, pas dans la direction voulue. Triss s'arrêta et fit signe à Kenan de rebrousser chemin. Trop tard, les chasseurs réalisèrent qu'ils étaient suivis et les deux impériaux n'eurent pas le temps de disparaitre. En quelques instants, le couloir se trouva balayé par des tirs de blasters, menaçant de briser la vitre à proximité d'un tir perdu. La chiss se mit à couvert dans un coin de paroi à demi enfoncée et tenta une sortie pour atteindre ses cibles. L'angle était mauvais, elle ne parvint pas en obtenir une ouverture plus satisfaisante. Ils n'avaient cependant plus le choix, derrière eux le couloir se poursuivait tout droit, ils ne pouvaient fuir sans se mettre dangereusement à découvert.

Kenan avait un plan pour le moins… Audacieux. Ou suicidaire, c'était au choix. Triss qui venait de songer au risque que représentait une vitre brisée comprit immédiatement l'intention de Kenan quand il lui indiqua leurs grappins, elle tira une dernière slave de blaster avant de saisir l'appareil à sa ceinture et de s'attacher solidement à une barre de soutiens à nue au travers d'un trou dans la paroi. Elle donna un coup sec sur le filin pour assurer sa prise puis fit signe à Kenan qu'elle était prête, il commença le décompte, puis tira. Le bruit de la vitre retentit, presque immédiatement assourdi par la perte de l'air empêchant les sons d'arriver jusqu'à eux. Le choc fut terrible, coupant le souffle de l'impériale qui se sentait irrésistiblement attirée par l'espace, comme si elle venait de chuter d'une falaise et se trouvait retenue par une corde après une violente accélération. C'était éprouvant mais ils étaient entrainés à pire, le choc passé et malgré l'air qui les faisait valser, juste retenu par les grappins, Triss reprit sa respiration, les mains agrippés à ce qu'elle pouvait, elle se tendit pour contempler le résultat dans le couloir : un superbe chaos, juste à temps pour voir le premier trandoshan être arraché du sol et passer par la paroi éventrée du couloir. Le second avait eu le réflexe de s'accrocher, lui aussi, aidé par ses puissantes pattes plantées dans le métal.

Triss assura fermement sa prise au sol et lâcha sa main gauche pour se saisir de son blaster. Le trandoshan commençait à avancer vers eux, évoluant d'aspérité à aspérité dans un but clairement hostile. L'air cinglant son bras l'empêchait de le stabiliser suffisamment pour viser, elle tenta quelques tirs avant de renoncer, ils manquaient de temps pour un coup de chance, alors elle observa les alternatives et la solution lui sauta aux yeux. Entre eux et le trandoshan, elle repéra le léger écart entre les plaques des murs indiquant un sas de sécurité, qui aurait dû précisément servir en cas de dépressurisation. Mais l'ensemble du vaisseau était si endommagé que les systèmes de sécurité étaient manifestement défaillants. La plupart des vaisseaux de cette taille possédaient un système de sécurité qui centralisait les alertes de la même manière qu'un système nerveux : une alerte était donnée quelque part, faisait remonter le signal jusqu'à un relai qui traitait les données et renvoyait l'ordre nécessaire pour résoudre le problème. Mais si le central de sécurité ne marchait plus ou que la connexion ne se faisait plus, un contrôle local plus basique était censé prendre le relai, sauf si le capteur de pression était lui aussi en rade. Ce qui devait être le cas. Un court-circuit pourrait alors forcer le capteur à activer le protocole d'urgence, et fermer ce fichu sas.

- Couvre-moi. J'avance vers le sas. Dit-elle, ou plutôt dût-elle crier car, même avec leurs comlinks intégrés, le bruit de l'air qui s'échappait restait assourdissant.



Toujours attachée par son grappin lui servant de ligne de vie, elle longea le mur, se devant de développer la même force que si elle s'était trouvée suspendue au-dessus du vide. Même au travers de ses gants, les prises n'étaient jamais que des éclats de métal et la moindre coupure dans son équipement ferait alors partir l'air et aurait des conséquences dramatiques. Elle repoussa cette idée et son instinct de survie en alerte, focalisée par son objectif et arriva enfin à un semblant de panneau de contrôle. Le détecteur de pression avait été éventré, probablement depuis très longtemps, comme elle s'en était doutée. Triss arracha la plaque qui protégeait les circuits, plaque qu'elle laissa échapper sans plus d'état d'âme et qui s'envola, emporté dans l'espace. Elle arracha deux fils, se débrouillant tant bien que mal avec une seule main, l'autre lui servant uniquement à s'agripper pour ne pas être emportée. Réunir les deux fils fut laborieux, surtout avec ce vent, mais à l'instant où le contact ce fit, il y eut un chuintement et le sas se referma, piégeant le trandoshan dangereusement proche de l'autre côté. Le calme se fit dans leur portion, l'air cessant de balayer la coursive et libérant enfin les deux impériaux du danger de se voir à leur tour balayés dans l'espace.

- Et si nous trouvions une autre sortie ? Suggéra-t-elle, la respiration légèrement haletante. Il y a probablement un moyen de rouvrir ce sas, si le copain est encore accroché, il pourrait en profiter.

Elle s'éloigna sans attendre de voir sa théorie se confirmer ou se réfuter, de toute façon cette coursive ne les avait pas menés dans la bonne direction. Ils revirent au niveau de l'escalier et elle monta un palier au-dessus, pour y trouver un couloir qui partait cette fois dans le sens de l'arrière du vaisseau, la direction qui les intéressait. Mais qui les faisait également passer potentiellement par les quartiers d'équipage, soit une zone potentiellement peuplée, si elle était encore en bon état.

C'était un risque certain de faire une mauvaise rencontre en passant par là. Les officiers avaient toutes les raisons de s'attendre à d'autres Trandoshans, pourtant ce ne fut pas de cette nature que fut leur rencontre suivante. A plusieurs reprises ils durent revoir leur itinéraire, la première fois parce que l'escalier qui devait les mener aux quartiers d'habitation avait été détruit, la seconde en voyant devant eux les signes évidents d'une bataille à tirs de blaster. Les deux impériaux aspirants avant tout à sortir de là n'était pas à proprement parlé dans l'optique de se mêler aux combats. En revanche, cela démontrait qu'il n'y avait pas seulement des Trandoshans à bord, autre chose attaquait sans qu'ils puissent encore savoir qui avait attaqué qui ; qui avait été présent à la base dans ce vaisseau, qui était l'agresseur… et qui avait déclenché cette fichue balise.
Alors ils patientèrent dans l'ombre. Triss faisait rapidement les calculs : cela faisait déjà une bonne heure qu'ils arpentaient ce vaisseau, un peu moins depuis que les moteurs avaient été allumés. Si elle considérait que les moteurs pré-impériaux des croiseurs étaient en moyenne 80% moins puissants que les modèles actuels, ils leurs faudrait au moins trois fois plus de temps pour regagner leur vaisseau avec un chasseur contemporain au croiseur dans lequel ils se trouvaient. Le voyage de retour s'annonçait encore long… Les tirs cessèrent et Triss mit un terme à ses calculs et à ses évaluations quant à leur position actuelle pour revenir à la situation présente : il était temps de repartir.

Ils n'allèrent pas bien loin, des bruits de métal les alarmèrent suffisamment pour que dans le même mouvement tous deux se mettent à l'abri. Des droïdes, c'était clair à présent que tels étaient les adversaires des Trandoshans, et les leurs aussi s'ils se faisaient repérer. La Chiss repensa aux modèles trouvés précédemment et principalement dans la salle des machines… Des droïdes assassins de la fédération du commerce, de l'époque du croiseur. Etait-il possible qu'ils soient restés tout ce temps en sommeil à bord ? Qu'est ce qui avait bien pu les réactiver… D'autres questions encore subsistaient et la Chiss avait horreur des énigmes non résolues, seulement le moment n'était pas encore venu de méditer là-dessus.

Sans compter qu'ils avaient été repérés.

Elle referma sa main sur son blaster, levant silencieusement la sécurité alors que Kenan lançait un regard discret vers l'angle pour évaluer ce qui allait les menacer. S'ils avaient été repérés cela impliquait surement que le droïde était équipé de capteurs de chaleur. Elle grinça des dents, regrettant de ne pas avoir pris la place de Kenan comme éclaireur : dans l'obscurité sa vision était sensiblement plus performante que celle des humains, Kenan était le seul des partis en présence qui ne pouvait distinguer efficacement les choses dans le noir. Elle voulut protester quand il fit signe de rester en arrière mais donner la moindre information vocale les trahirait, elle ne pouvait rien faire de plus et, à la réflexion, elle n'était pas même sure que son ami savait qu'elle disposait de cet avantage visuel.
Le pilote passa à l'attaque alors que le droïde se perdait encore dans ses fichiers, incapable d'identifier correctement l'affiliation de l'humain, il prit sa décision trop vite et la déflagration annonça à la Chiss que jamais le droïde ne trouverait la réponse.

- Un instant, tu veux bien ?

Elle s'approcha du droïde et se servit de son couteau pour soulever la plaque protectrice de son crane fendu par le blaster, prenant garde à ne pas se brûler dans l'opération, et eut un sourire satisfait en découvrant la carte mémoire intacte de l'appareil.

- Super. Je te parie 10 crédits qu'on y trouvera au moins l'historique de la dernière mission de ce croiseur. On aura pas complètement perdu notre journée. Souffla-t-elle avec l'excitation retenu de l'officier des renseignements ayant en main des données qu'il lui tardait d'analyser.

Elle se releva et prit la suite de Kenan, ne lâchant cependant pas son blaster même s'ils prenaient à présent une direction où, normalement, plus personne ne devait se trouver. Cependant, personne n'était censé se trouver dans ce croiseur tout court. Voici qui ne fait pas de nous des aventuriers… Commenta Triss en observant le couloir. Puis, réalisant que ses propos devaient sembler sibyllins, elle précisa sa réflexion. Tu sais, cette vieille histoire Mandalorienne qui relate les aventures d'un groupe de chasseur particulièrement incompétent, qui explorent ce vaisseau où ils leurs aurait suffi d'aller tout droit pour toucher au but mais que "les aventuriers ne vont jamais tout droit" ? Expliqua-elle en avançant.

Le plus drôle fut qu'à l'instar de cette légende dont elle se souvenait avoir ri de la stupidité, le chemin allant tout droit ne tarda pas à déboucher sur un autre couloir, plus large, qui ouvrait à quelques pas d'eux vers un hangar à vaisseau. Repoussant tout commentaire sur "le sens de l'humour particulièrement pitoyable de l'Univers ou de la Force", Triss préféra apprécier ce doux dénouement à sa juste valeur : l'endroit était éclairé et quelques vaisseau y étaient parqués, encore branchés à des tuyaux de carburants et de courant, ce qui indiquait qu'ils étaient prêt à être utilisés et en état de voler. Tu vois ce que je vois ? Murmura-t-elle à Kenan avec un sourire en coin. Enfin, tout n'était pas joué car qui disait véhicules opérationnels disait surveillance. Elle lança un regard rapide vers l'intérieur et détecta un petit groupe de Trandoshan, cinq, peut être six. C'était risqué.



- Au moins cinq Trando près du transport sur la droite. Mais j'ai une idée… J'ai repéré un terminal de l'autre côté, je peux peut-être déclencher une fausse alerte sur la passerelle, ça les forcerait à ne garder que la sécurité minimum ici. C'est exposé alors ça va certainement tourner à l'affrontement. Mais ils ne savent pas qu'on est deux, je pense, alors tu pourras jouer l'effet de surprise quand j'ouvrirais le feu. On se retrouve à bord.

Sur un dernier signe de tête, elle se glissa hors du couloir en silence. La navette cachait le terminal de la vue des Trandoshan et aucun ne regarda dans sa direction le temps où elle fut exposée. Elle atteignit la console et entreprit d'accéder aux dossiers : c'était un système de données très familier : le système impérial en découlait directement. Elle n'eut aucun mal à trouver son chemin jusqu'aux commandes de sécurité de la passerelle, déclencher l'alarme fut enfantin pour elle qui avait passé sa carrière devant des écrans de Destroyers. Le plus délicat fut de s'assurer que le contact entre ce terminal et la passerelle était encore actif, auquel cas sa tentative de signal se solderait par une alarme, oui, mais sur ce terminal, amenant probablement un gros renfort de troupes dans le hangar.

L'alarme s'activa, d'abord lointaine puis prenant possession de tous les hauts parleurs encore en état du croiseur, une alerte qui ne voulait dire qu'une seule chose : passerelle attaquée. Le groupe de Trandoshans échangèrent des regards, quelques mots, puis se séparèrent. Une équipe disparue par un couloir, sans voir la Chiss cachée derrière le terminal. Elle laissa couler quelques instants, assez pour que les déflagrations soient assez couverte par l'alarme et ne soient pas entendues par ceux qui venaient de partie. Puis elle fit feu. Le premier tir bénéficia de la surprise et vint toucher un premier reptile à l'épaule, blessure létale ou non, il tomba au sol, inerte. Sans attendre de leur laisser l'avantage, elle fonça, passant au-dessus d'une caisse d'équipement pour s'engouffrer sur la rampe de la navette. De là, elle resta à semi-couvert, comptant encore deux Trandoshan encore debout qui tentaient de l'abattre, elle aussi. Un tir la frôla, malgré sa combinaison elle sera les dents en sentant la chaleur lui brûler la peau. L'avantage, c'était que concentrés sur elles, les Trandoshan tournaient à présent le dos à l'ouverture où se trouvait Kenan.