Il avait du mal à tenir debout, un coup de trop diraient certains, d'autres choisiraient de se taire plutôt que de se tromper. Il avait du mal à tenir debout, lui, l'homme capable de dépasser les autres par sa simple carrure, de les juger d'un regard, de les tuer aussi, de les épargner parfois. Et la femme devant lui ne disait jamais rien des faiblesses qu'elle voyait, pouvait-on juger quelqu'un simplement à l'échelle des choses qui lui manquaient ? Peut-être, mais Triss ne le faisait pas. Et ce qu'elle pensait réellement de lui restait un secret face à toutes les fonctions que Seth remplissait pour le bénéfice de la jeune femme.
Si les orbes rouges n'exprimaient nulle patience, Seth ne baissa pas le regard pour autant. Il ne le faisait jamais avec elle, lui déjà par trop obligé de se courber trop souvent face à son corps défaillant.  Et puis, il n'avait pas peur. : des yeux, rouges ou non, restaient simplement un organe de plus pour pallier à ce que l'esprit ne pouvait voir. Aussi, Seth s'interdisait de trembler devant le moindre regard, il ne le faisait pas, il ne l'avait jamais fait.

 « Le bonjour à vous, Lieutenant...Ma foi je vous dirais tout oui, contre une tasse de thé évidemment... »

Il jouait avec le feu, non, il se jouait du feu, et cette femme au fond, il l'aimait bien. Une amitié étrange, bancale, qui parfois ne se partageait pas, lorsque l'uniforme devenait étouffant, mais une amitié quand même. Il savait qu'elle serait là, voilà pourquoi l'homme n'avait pas craint de se battre. Son arcade sourcilière avait été ouverte, il saignait, et pourtant e sang sur sa peau pâle semblait par trop moins puissant que le rouge de feu et de pouvoir, du regard de la militaire.
Pour lui, elle était un ami, pour elle, sans doute ne représentait-il qu'un caprice bien étrange, et cela lui allait. Ill trouvait même la force d'en rire parfois, en la regardant, les lèvres à moitié relevées, silencieux pourtant. Ses rires s'entendaient peu, l'homme restant un homme de secret avant tout.

 « Mais pour vous faire patienter...Il fallait que je le tue »

Et Seth ne riait pas, pas ici, pas maintenant, pas en disant cela. Les mots avaient été prononcé avec la même gravité que lorsqu'il annonçait rompre un contrat. Donner la vie. Sauf qu'ici, on parlait de mort, quelque chose fort peu dans les habitudes du chasseur de primes lorsqu'aucun contrat n'était en jeu.
Alors il y avait de la tristesse aussi, face à quelque chose d'immuable, de tragique, quelque chose qu'ils ne combattaient pas l'un comme l'autre, qu'ils ne décrivaient pas également. Les yeux dans les yeux, pas un rapport de force pourtant, car les rôles étaient définis, car ils ne changeraient pas. Un pion face à une reine sur l'échiquier, un pion capable de devenir autre chose un jour peut être lorsqu'une reine jamais ne pourrait changer.
Alors il s'en excusait presque du regard, de la savoir figée ainsi avec ses rêves et ses envies. Une autre femme qu'il respectait un peu trop, et il se rappelait de vieux proverbes d'autres planètes, d'autres contrées. Les femmes possédaient la moitié du ciel, sauf Triss peut être -il avait essayé de prononcer son nom entier une fois, par respect- qui ne s'arrêterait pas avant de le posséder entièrement. Et Agheera qui faisait sien tous les déserts pour que grands jardins ils deviennent...Quel intérêt, le ciel alors hein ?

 « Vous avez passé une annonce dernièrement je crois pour un contrat.... nous nous rendions tous deux, cet homme et moi pour y répondre. Sauf qu'il m'a parlé d'un autre qu'il songeait à accepter... Alors pour cela je l'ai tué.  Il s'st juste avéré que nous nous tenions ici, un simple concours de circonstance »

Les yeux noirs, les secrets, le léger mouvement de la tête comme une excuse -sincère- comme une douleur aussi, et quelque chose de pur brûlait pourtant sous ce corps difforme de trop de gestes. Quelque chose qui brûlerait toujours, et certains contrats étaient marqués alors. Pour lui. Parce que certaines personnes n'avaient plus le droit de mourir.

 « Hm... je n'ai pas trop de quoi payer une caution si vous m'arrêtez.... désolé je risque d'occuper une de vos cellules »

Il paraissait contrit en effet, conscient de gaspiller du temps à la jeune femme, de l'argent aussi peut être, ou utre chose, comme de l'honneur. Alors la douceur dans son regard ne s'atténuait pas, propre à sa nature, lui qui avait tué quelqu'un pourtant. Pour protéger, mais tuer restait une faute alors même que cela était son métier. Qu'importe....

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Peu importe toutes les fois où il s'était tenu ici pourtant, Seth ne se rappelait pas, ne se rappelait jamais de tous les divers chemins à l'intérieur du bâtiment. Aussi, lorsqu'il suivait Triss, c'était en aveugle bien sûr, mais la tête droite, comme toujours. Un masque, un masque pour cacher chacune de ses difficultés, et ne rien savoir reconnaître de la droite ou de la gauche n'en était qu'une infime partie. Il n'en parlait jamais, pas à ceux lui offrant un emploi, des contrats. Pas même à son reflet parfois, et la cabine de ascenseur était petite un peu, alors Seth ne savait comment y entrer, comment s'y caser. Il fallait suivre Trss pourtant, alors il obéissait, le corps tendu comme un animal sauvage prêt à se cogner aux barreaux d'une cage qu'il ne comprenait pas. Qu'il ne comprendrait jamais. Et sa vaste présence était une ombre entre questions et menaces, car il y avait un danger malgré tout, dans ses yeux, dans ses mains, en lui. Le tueur, le chasseur...

 « Je savais ce que je risquais, et quel genre de gardes étaient faces à moi, je le savais... »

il n'y avait rien de menaçant dans la voix grave, un peu douce, et peut être était-ce en cela qu'une lueur dangereuse semblait en illuminer les mots. Parce qu'il était déjà venu ici bien sûr, parce qu'il passait alors devant de nombreux gardes, qu'il les reconnaissait parfois car si Seth ne pouvait trouver de repères dans l'espace, il avait appris à s'accrocher aux détails des postures et des visages pour comprendre l'environnement dans lequel il se trouvait alors. Triss était un officier compétant en plus d'une personne intelligente, elle se savait sur un fil avec lui, capable de tomber aussi bien que de le pousser, mais aujourd'hui cela semblait être lui qui la menaçait ainsi. A lui faire comprendre qu'il pouvait savoir quand le bâtiment se trouvait peu gardé, quand une quelconque attaque pouvait être menée peut être.
Et tandis qu'il se battait, risquant sa vie pour peu de choses, avait-il compté alors les quelques secondes nécessaires aux soldats pour appeler la jeune femme ?
Oui.
Le temps mis pour qu'elle analyse les informations, la situation, et descende jusqu'à eux ?
Bien sûr.
Mais de tout cela, il ne disait rien, laissant les conclusions flotter entre eux comme elles le faisaient toujours, comme les longs silences de Triss lorsqu'elle lui confiait un contrat qu'elle savait qu'il ne refuserait pas. Car la Chiss savait bien des choses de lui par son seul comportement, ils jouaient un jeu de dupes ensembles, ils y jouaient tellement fort que désormais la simple trahison serait douloureuse entre eux. Ils l'acceptaient, ils l'acceptaient tous les deux....
Elle le conduisit à son bureau évidemment, elle l'y conduisait toujours et rien ne changeait jamais dans ce qu'il y trouvait. Lentement, parce que cela était ainsi, l'homme prit place sur l'un des deux sièges offerts aux visiteurs. Toujours le même bien sûr, et sa grande carcasse semblait comme peiner à y entrer. Il était grand, Seth, il était large d'épaule, de carrure et ses jambes semblaient comme incapable de se plier d'elles-même. C'était quelque chose d'étrange de voir cet homme toujours debout, toujours fatigué, mais incapable de s'asseoir de par la douleur diffuse que cel infligeait à son corps comme à son esprit, entre la difficulté des mouvements propres bien sûr, et sa taille comme un nouvel obstacle surtout.
Jusque au bout son corps le dénonçait comme incapable d'appartenir au monde l'entourant, peu importe la planète, peu importe le système, peu importe la galaxie.
Il prit la première chose que lui tendit la femme, l'esprit un peu ailleurs, comprenant vaguement que cela avait un rapport avec le fait de se signer, puis la difficulté augmenta alors que d'autorité, elle lui mit une deuxième chose dans sa main libre, alors Seth ne pu lever aucune des deux, incapable de coordonner, sentant le sang sur son visage et fronçant les sourcils un peu, malgré la douleur, parce qu'il savait ce qu'il devait faire bien sûr, mais que comme d'habitude, son corps n'obéissait pas. Il était bloqué...

 « Hm... »

L'odeur du thé, les tasses posées sur le bureau, une était pour lui et...Ah oui, il avait les deux mains prises encore. Comment faire ? Poser quelque chose, oui, mais lequel des deux, et surtout quel était le geste déjà ? Ca y est, son cerveau se déconnectait complètement, étranger à tout, même à l'homme qui pourtant le possédait.

Heureusement, les questions revinrent, et s'il ne savait plus comment bouger, au moins il pouvait parler.

 « Pas d'autres blessures, enfin je crois...il a été trop surpris pour ça. Et...hm... un contrat...Je devais tuer quelqu'un pour une rancune vieille de bien des années. La faute des parents qui retombent sur l'enfant seul survivant... J'ai pas pu, vous vous en doutez. Et je ne veux pas que ce contrat soit exécuté. C'est ainsi... »

La simple odeur du thé apportait quelque chose de réconfortant, c'était bien ici, c'était être en sécurité malgré les yeu rouges qui ne vous quittaient pas, malgré les ordres de Triss parfois, les menaces qu'ils se lançaient, les menaces les yeux dans les yeux, eux qui se respectaient toujours un peu trop.
Parce qu'ils avaient été modelé au meurtre et à la haine, voilà tout...

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La première fois qu'elle l'avait soigné, la première fois qu'elle avait tendu la main vers lui, il aurait pu la tuer. Une panique pure et simple, une terreur sans noms face à elle, elle qui représentait l'ennemi, face à sa propre faiblesse à lui... Et la Force avait bouillonné alors, sournoise et désespérée, crevant de s'échapper.
Qu'est-ce qui l'en empêcha pourtant, quel détail fut assez grand pour le retenir dans sa folie grandissante ? L'homme ne répondrait pas, ne répondrait jamais.
A moins qu'en vérité, il n'ai jamais été un meurtrier ?
Les gestes de Triss étaient simples, efficaces. Comme toujours. Seth ne pensait plus à se défendre, face à elle, il acceptait. Il l'acceptait. Elle pouvait soigner la moindre de ses blessures avec cette froideur amicale la caractérisant, elle pouvait l'aider à comprendre où il avait mal, pourquoi. Elle pouvait.
Ils s'analysaient l'un l'autre, beaucoup, trop peut-être, trop pour une amitié saine, oui. Mais il n'y avait rien de sain là dedans, l'époque, eux, non... On tuait des gens pour vivre, on choisissait d'en épargner d'autres, on saisissait des rêves et des espoirs trop grands, on attendait. Et le thé bien sûr, le thé surtout, comme un simulacre de chaleur humaine entre eux. Un point fixe dans l'univers : si Triss servait du thé, tout allait bien et Seth n'aurait plus mal. La preuve, elle l'avait soigné...
Comme la première fois. La fois où il avait failli la tuer.

 « Merci.

Un instant il failli se faire prendre, se laisser avoir, là, comme ça, les yeux mi clos. La jeune femme semblait comme le bercer à moitié de ses mots... Alors, à la première question il répondit par un sourire seulement, triste et fataliste. Un de ceux pour simplement dire « je ne sais pas, mais je le fais quand même », car pouvait il y avoir une seule autre réponse valable ? Non, pas pour le souvenir d'Agheera qui continuait à brûler ainsi dans sa poitrine. Pas pour deux yeux noirs, le parfum du sable sur les dunes, les dunes qu'il n'avait jamais vu...
A la deuxième question, il rouvrit les yeux, bercé par une douceur et une tendresse protectrice qui sentaient le thé chaud et le réconfort. Des mot pour reconnaître son existence, non ses actions, et on ne disait pas cela d'un chasseur de primes, on ne demandait pas. Triss le faisait, étrange à son habitude, et tout était naturel pourtant chez elle. Alors, lorsqu'elle demandait ainsi, presque mélancolique, il croyait en chacun de ses mots bien sûr. Il y croyait comme à ceux d'une amie, car elle possédait cette intelligence froide que Seth attendait de beaucoup trop, celle capable de le guider lui dans les méandres de sa propre pensée.
Alors, parce qu'elle réfléchissait pour deux, il se perdait.
Ce fut là que vint le coup.
Une question de plus, une question de trop, alors même que Seth se pensait en sécurité, simplement avec une femme capable de s'inquiéter pour lui. Elle ne s'inquiétait pas pour lui en vérité, elle s'inquiétait de lui, et Triss savait être une vipère subtile bien qu'encline à l'amitié.

 « Tous mes contrats ne proviennnent pas de vous.... »

Ses pupilles s'étrécirent un peu, pareilles à deux chiens sauvages prêts à sauter dans le lac de sang qu'était le regard de son adversaire. Il y avait des codes, il y en aurait toujours, et la confidentialité en faisait partie. Seth n'avait aucun remords à dénoncer et reporter des ordures, qu'il ait exécuté le contrat ou non, et donnait souvent à l'Empire des os à ronger. Des os encore dégoulinants de viande. Il s'estimait encore malgré tout libre de ses choix, Triss essayait de lui faire comprendre que non.
Il y avait une colère sourde dans les différentes ombres de son regard à présent, il y avait un danger aussi, et l'odeur du sang, bien qu'elle l'ait vu faible à peine quelques minutes avant. Le sang d'un autre homme.
Oui, il était un tueur finalement.

 « Et les rancunes tenaces entre deux familles de mécaniciens n'ont rien à faire avec les querelles politiques. N'outrepassez pas vos droits, lieutenant. »

Il n'était pas en position de force, il menaçait pourtant. Lorsqu'ils s'affrontaient l'un l'autre, c'était toujours ainsi, et cela pouvait arriver, oui, car leur danse était un combat après tout. Ils s'affrontaient, ils s'affronteraient toujours, le chien furieux et la chasseresse voulant lever trop de proies peut être.
Et si Triss se référait aux droits de l'Empire, Seth lui opposait ceux de l'honneur, au delà même du bien et du mal.
Car s'il ne le faisait pas, s'il n'y obéissait pas, qu'est-ce qui l'empêcherait de sortir l'une des nombreuses armes qu'il cachait sur lu, là, en cet ultime instant ?
De tirer ?
De tuer ?

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Dans leurs yeux qui se jaugeaient, il y avait le fracas des épées, il y avait l'orage grondant aussi, et puis une main tendue peut-être, une main qu'ils n'attrapaient pas, l'un comme l'autre, parce que qu'est-ce que cela voudrait dire sinon ?
Triss respirait le pouvoir, l'autorité, elle était tout autant le poing qui se lève que la tête qui se courbe face aux ordres des plus importants. Elle était cette menace sobre et sourde qui peu à peu plantait ses griffes à nouveau dans un monde trop heureux de se faire contrôler, vague espoir qu'une absence de choix serait une absence de douleur aussi. Seth crachait au visage de ce monde, et tout dans sa posture le trahissait à présent, sans orgueil, sans défi. Car telle était sa manière d'être, simplement, malgré les sacrifices, malgré les trahisons. Alors on comprenait un peu mieux peut-être, on le comprenait, lui qui revendiquait chacun de ses choix comme un accusé refusant de s'agenouiller, lui qui mentait et manipulait malgré l'innocence de ses amitiés. Lui qui dénonçait tout autant qu'il se dénonçait... Et pourtant quelque chose de pur existait, et s'l tuait c'était par amour un peu, tout autant qu'il sauvait.

Ils n'avaient pas eu besoin de se lever, l'un comme l'autre, geste de gens ne sachant véritablement comment asseoir leur domination. Seth, Triss, tous deux savaient l'importance du langage physique, langage où les silences étaient éloquents eux aussi comme avec n'importe quelle phrase, n'importe quel mot. Il y avait les menaces, lourdes, rampant sous leurs chairs à tous deux, prêtes à exploser peut-être, mais il n'y avait pas encore les agressions, non. Pas vraiment. Les ténèbres et le sang, yeux dans les yeux, et les mots glissaient avec une souplesse féline pour remplir la pièce de sons presque étranges à présent, tandis que les corps se tendaient, se surveillaient. Le lion et l'amazone.... Il y avait un combat, il y avait une revendication, celle de choses à chérir pour un cœur sombre, un homme mauvais, celle de ne pas trahir, pas tout. Peut-être y avait-il des gens que Triss aimaient, des choses autres que le thé qu'ils partageaient, et Seth aurait pu questionner à son tour. Car combien de fois s'était-il retrouvé ici, comme un ami, permettant à certains détails trop intimes, trop familiers, de s'échapper, pour ne retenir que ceux et froids caractérisant l'Empire ? Ils avaient des armes, tous deux, des armes à s'opposer, et seul le respect empêchaient certaines actions. Parfois le respect se fissurait, comme maintenant.... La solitude de Triss, cela aussi était une lame à enfoncer dans sa poitrine, et de telles épées, Seth savait comment les manier. Dans ses yeux, de multiples douleurs, dans sa bouche, des mots pour rassurer, dans son cœur un poison vif, et les mots pouvaient soudain devenir meurtriers...

 « Les limites, vous venez de les franchir, Lieutenant... Regardez-vous, perdue, égarée, et il ne tient qu'à moi de vous ramener sur votre chemin à présent.... »

Sa voix basse était à peine un murmure, à peine un grondement, venant désarmer les mots de la femme comme une ombre se glissant dans son dos, l'attrapant, une main sur son cou, ne manquait le craquement...

 « Je ne sais quel est cet autre contrat, mais un message m'a été transmis, alors me voilà... N'est-ce pas cela que vous voulez de votre chien ? Sifflez, il arrive. Alors, lieutenant, qui a sifflé ? En êtes vous jalouse ? Peut-être qu'on vous vole votre jouet après tout.... »

D'une main grande, comme si soudain Seth avait décidé d'imposer tout ce qu'était sa taille, tout ce qu'était sa présence, il saisit la tasse. A peine une brûlure entre ses lèvres, le thé aux multiples parfums, subtil comme pouvait l'être chaque mouvement de la femme qui le regardait. Il but tout d'un coup, évidemment, comme enivré, et d'autres ténèbres s'ajoutaient à ses yeux sombres alors.
Il était grand, Seth, et, dans une maladresse gracieuse de fauve à l'agonie, il était debout.

 « Et si le chien pouvait parler, que dirait-il ? Peut-être lui a-t-on donné quelque friandise qu'il n'aurai jamais dû recevoir, après tout.... Est-ce cela qui vous inquiète ? Je ne cherche rien, je suis un chien, votre chien... »

Les informations qu'i amassait au fur et à mesure, il les gardait à lui. Pour le moment. Parce que pour cela, il pouvait se faire tuer bien sûr, parce que quelques miettes ne justifieraient pas sa douleur, alors oui, l'homme attendait son heure, analysant la situation jusqu'à être capable de présenter un jour le point faible de l'Empire ou, s'il n'existait pas, de le créer peut-être. En la personne de Triss.

Sans ciller ne serait-ce qu'une seule fois, inhumain presque soudain, peut-être autant, peut-être plus que la jeune femme, il se plaça devant elle. Elle qui restait assise, et qui était la menace de l'autre ? La menace, alors qu'il lui saisissait la main, l'attrapant au poignet sans douceur, la tirant un peu, et elle était forte, elle était musclée, mais l'homme aussi, et il y avait la surprise. Parce qu'elle ne pourrait jamais rien prévoir de lui... Et dans les doigts qu'il tenait, Seth glissa son blaser soudain, le canon face à lui-même, alors que l'index de la jeune femme n'avait pas besoin de son aide pour trouver la détente. Elle était soldat après tout, elle avait ses réflexes, et lorsqu'il tomba à genoux pour que l'arme se colle à son front, il y avait là le plus horrible des sourires sur son visage, lui qui n'attendait rien d'elle, pas même le moindre soupçon d'émotion.

 « Et si vous n'aimez plus votre chien, si vous avez peur de lui, alors tirez. Si vous craignez ses griffes et ses crocs, si vous sursautez au moindre de ses aboiements.... Alors, lieutenant, me craignez-vous, avez-vous peur de moi ? Je protège les innocents, mais je ne suis qu'un homme lorsque vous représentez tout un système politique. N'avez-vous pas les mêmes aspirations que moi ou bien l'Empire n'est-il que cet ordre fait pour détruire et non pour créer, aujourd'hui encore ? Tirez ou ne tirez pas....»

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Quelque chose d'extrêmement sauvage se déployait en lui alors, comme un poing levé face au calme froid de la jeune femme. Il y avait ce chien noir, cet animal, ombre de son ombre, qui voulait hurler et glapir tout à la fois, traduire par des cris chaque peine, chaque douleur que ce corps immense semblait supporter. Mais il n'y eut que le silence alors, là, yeux dans les yeux, après les reproches.
L'air était aussi lourd qu'au sortir d'un champs de bataille, il évoquait quelques heures volées à deux, volées à eux la Chiss et l'Humain, la chasseresse et le chien, dans le secret d'une salle quelconque pour s'entraîner un peu. Lorsqu'ils s'affrontaient physiquement alors, que quelque chose semblait naître de leurs mouvements, elle qui guidait sa main, et elle le voyait utiliser ses lames, elle le voyait utiliser le blaster, songeuse, le brûlant alors du poids de son regard. Car Triss sentait qu'une autre arme lui appartenait, une arme qu'il ne portait plus.
Cela était étrange, accepter les conseils, les remontrances aussi, mais, née pour commander, la jeune femme savait comment rendre efficace ce bien triste soldat.
Et puis parfois il y avait ces fulgurances, lorsqu'il se concentrait assez, lorsque l'énergie dans la pièce changeait au moins un peu et que, plein d'une grâce mortelle, alors il attaquait. Cela se terminait par un couteau sous une gorge, Triss ou lui selon comment la jeune femme arrivait à y répondre, à s'en défaire, et il souriait alors comme d'autres monteraient les crocs.
Oui, il y avait ce genre de combat là aussi, entre eux, entre amis. Et tous les secrets que cela cachaient, ils apprenaient à s'y connaître pourtant, s'y connaître un peu plus. Car jamais Triss ne se moquait...

Il y avait en elle cette froideur objective qu'il chérissait avec une tendresse respectueuse, la caressant des coups de sa propre violence pour l'ébranler un peu ou, au contraire, l'y trouver renforcée. Lorsque Triss, lieutenant de l'Empire, voyait quelque chose, cela était sans le masque des sentiments. Non, eux, ils ne venaient qu'après, comme une réponse à une situation plutôt qu'une simple excuse pour quelques mots et compliments. Elle lui rappelait la sagesse de certains grands maîtres ancestraux, et l'imaginer capable de Force, c'était s'imaginer lui, simple Padawan à ses côtés. Alors même qu'il était l'aîné. Pourtant, la jeune femme était déjà une personne remarquable à sa façon, il n'y avait pas besoin de lui donner la Force pour la regarder, pour l'estimer.
Un feu intérieur, une main sur son épaule, elle voyait quel chemin ce chien fou empruntait à l'instant, oui elle le voyait, et sans haine ni pardon, elle le rappelait.
Une main sur son épaule, une main sur sa joue aussi. Quelque chose d'étrange dans le geste, dans l'acte, quelque chose de profondément inhumain car ce qui avait poussé Triss à cela ne pouvait simplement être décrit... Il y avait une logique bien sûr, froide et implacable que Seth ne questionnait pas, car elle faisait partie profonde de la femme devant lui, mais l'empathie qu'elle éprouvait, il la savait différente de la sienne pourtant, lui, le cœur écorché, le cœur mauvais.

Quelque chose d'extrêmement enfantin sembla se dessiner alors, dans le fond de ses yeux, dans le triste sourire solitaire qu'il eut soudain. Il était jeune garçon, celui au bord du gouffre, celui qui ne savait grandir, et cette main aurait pu être celle d'une mère alors, d'une mère peut-être.... Pourtant il y avait le danger aussi, le jeu dangereux auquel ils s'adonnaient et un jour ils s'affronteraient.... Etrange n'est-ce pas ? Car alors même que Triss montrait envers lui une douceur sincère et une affection certaine, l'homme ne put réagir que par la violence, la sensation de danger. Elle caressa sa joue, elle rejeta l'arme et lui...
Lui porta soudain la main à sa ceinture dans un geste d'une fluidité tragique. Et le mouvement était différent alors, différent de celui pour saisir le blaster ou bien même quelque lame cachée, non, et sa main ne rencontra que du vide.
Parce qu'il n'y avait plus d'épée à tirer.
Son geste avait été celui d'un escrimeur, il n'avait pu l'empêcher, instinctif, sauvage, faisant appel à un instinct de survie dont Seth se pensait pourtant dénué. Et Triss avait du le voir bien sûr, comment manquer cela ? Que'n pensa-t-elle alors, quand les souvenirs de leurs entraînements lui renvoyait une toute autre image de l'homme, de sa manière maladroite de combattre ? Quelque chose de létal en lui se réveillait parfois, elle le savait, et Seth s'en habillait comme de la sournoiserie d'un chasseur de primes, quelque chose qu'on ne pouvait questionner.
Ce geste là, avait été dicté par quelque chose de profond, de viscéral, et Seth en savait fort bien la cause.
Parce qu'elle était là, devant lui, et que le son de sa voix résonnait encore, comme un pont entre eux.
Triss, sa froideur, sa vision du monde loin de la pitié et de sentiments, et lorsqu'elle disait quelque chose, cela était vrai.

Il protégeait les innocents.

Quelque chose du jedi s'était réveillé en lui alors, du guerrier. Il avait la gorge sèche, les yeux meurtris aussi, de ne pouvoir voir le monde autrement. Et puis soudain il se détendit, acquiesça sans que cela n'enlève en rien la tension entre les deux.

 « Peut-être est-ce ce que je fais, oui, et peut-être pourrais-je valoir plus, bien plus, si tu devenais reine, princesse ou.... impératrice... »

Le dernier mot fut triste, le dernier mot fut faible, il croyait en elle, en ce qu'elle représentait, oui. L'empire s'oubliait dans l'ombre de Triss, ne restait qu'une femme de pouvoirs capable de guider les autres. Un rêve bien sûr, et le sourire doux sur ses lèvres n'évoquait rien d'autre, cela aurait pu être oui, dans un autre monde, dans une autre vie, et quelque chose d'ancien s'installa soudain. Car es Jedis n'avaient pas été que des guerriers, et face aux différentes politiques, bien souvent avaient eu le rôle de conseillers....

 « Car se mettre à ton service serait alors bien moins douloureux, je sais ce que tu vaux, je sais tes qualités... »

Et ses mains se joignirent alors, dans une pose vénérable qu'une fois encore il ne pu réprimer...

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Une femme comme Triss saurait porter couronne, mais l'intelligence froide et le cœur meurtri qui la composaient, l'enjoignaient à bien plus de sagesse. Alors, triste, Seth pensa à d'autres femmes, à Ash qui craignait de ne savoir quel combat mener, à Agheera, effrayée de sa propre nature... Il pensa à lui aussi, dont le reflet était une ombre de regrets.
Etaient-ils donc tous dénués de noblesse pour fuir ainsi des chemins empruntés par tant de héros de contes et légendes ? Il y avait quelque chose d'ignoble et d'humain tout à la fois, alors, une envie de sacrifice et en même temps une douleur, une barrière, car rien ne saurait être simple. La femme devant lui sembla songeuse, d'autres n'auraient pas remarqué peut-être, mais pas Seth...
Observer, une qualité qu'il essayait de garder, une qualité capable de sauver la vie, et Triss rêvait au moins un peu malgré ses mots amers. Rien d'autre qu'une insigne ? Non, elle avait de l'ambition, elle pouvait être autre chose, elle devait être autre chose. Tout comme lui...
Alors Seth acquiesça sans savoir pourquoi son cœur était si lourd. Certaines choses étaient ainsi, voilà tout....

« Non.... »

Il n'avait pas besoin d'hausser la voix, il n'avait pas besoin d'être triste, d'être quoi que ce soit, et la décision était sienne, il la portait comme il porterait bien d'autres armes, bien d'autres questions. Leur amitié avait un prix, un code, des lois, qu'importe qu'ils en redéfinissent sans cesse les limites, car certaines ne pouvaient se dépasser pour autant.

« Non Triss, je ne resterai pas.... Et peut être auriez-vous alors le temps de regretter de ne m'avoir tué aujourd'hui, ou peut-être pas. Certains événements peuvent être rapides après tout.... »

Elle le voulait grand, il s'y dérobait pourtant, par jeu, par envie, car la cause qu'elle servait, il la rejetait, car la personne qu'elle était, il la respectait. Lorsqu'il obéissait, cela relevait de l'ordre de l'intime, du personnel, alors il ne discutait jamais les prix, et quand il la blessait, il tâchait de l'aider à s'en relever chaque fois. Se relever de lui, de ses décisions de folie.
Elle, esclave de ses journées au service de l'Empire, lorsqu'il restait encore tant de choses à construire pourtant.
Encore une fois, il y eut un silence. L'homme hésita à redemande du thé, il avait faim, il avait froid, il ne prendrait pas de contrat aujourd'hui apparemment, et son ventre resterait plus ou moins vide de ce fait. Cependant, le visage sombre et impassible ne trahissait rien de cela,

 « Ma journée semble également terminée.... »

Il hocha la tête, comme pour répondre à quelque interlocuteur invisible. Et ses yeux semblèrent moins sombres alors, comme gris des cendres d'un ancien feu... Lentement, avec cette démarche qui était la sienne, celle le rendant dissemblable à tant d'autres êtres humains, il se tourna vers la porte, prêt à partir. L'annonce de la mort de son adversaire ne lui faisait rien, absolument rien, il y avait des vies à respecter peut-être, mais pas toutes. En cela, Seth s'éloignait drastiquement de l'enseignement jedi, tout comme de la philosophie même de Luke Skywalker. Mais le rapport aux ténèbres des deux hommes avaient été différent, pour Seth, le côté obscur ne représentait rien d'intime et viscéral, et plus que tout, il aimait se laisser séduire par bien des subtilités d'ombres et de lumières. Pour que seule cette dernière ne reste....

L'homme ne remercia pas la Chiss également, il ne se considérait pas comme en dettes avec elle, tout comme il n'estimait pas que la jeune lui devait quelque chose de plus que de simples crédits lorsqu'il acceptait un contrat. Chacun prenait à l'autre ce qu'il désirait, les remerciements, la gratitude, tout cela n'avait pas besoin d'être énoncé. Ils verraient après, ils verraient plus tard, lorsqu'entre eux, l'heure des comptes sonnera enfin.

 « Je ne vais pas plus abuser de votre temps, j'ai du travail à chercher... Cependant je ne dirai pas non à votre compagnie, du moins jusqu'à la sortie. Vous pouvez également m'offrir un verre, en échange je vous promets de vous écouter vous plaindre de tous vos supérieurs sans sourciller. » 

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Le bruit des pas lui résonnait au cœur depuis quelques instants déjà, une personne, une seule, mais parfois cela pouvait être assez pour tuer. L'homme ne changea rien à sa démarche pour autant, il n'était pas militaire, ne l'avait jamais été, mais quelque chose de rigoureux et de martial sembla alors l'animer. Un peu de cette essence même qui poussait Triss à lui offrir son amitié peut-être, il ne savait pas., et la jeune femme non plus, ne paniquait pas... Seth savait peu de choses de son implication face au danger et des possibles combats qu'elle avait déjà mené. Il ne la questionnait pas, jamais, pas là dessus, lui-même portait ses propres traumatismes après tout. La nuit, les yeux fermés, il sentait encore l'odeur de la mort, le regard des cadavres...
Les cauchemars ne partaient pas.

Il y avait le blaster à sa ceinture bien sûr, celui que Triss lui avait rendu, peut-être encore chaud de l'empreinte de ses doigts, il ne savait pas. Mais l'homme derrière eux le surveillait lui, plus particulièrement. Parce que Seth était un tueur, voilà tout, et que quiconque doté d'un semblant d'esprit n'attaquerait pas un officier ici, en pleine rue. Sur le territoire de l'Empire... Alors la cible ne pouvait être que autre, la cible ne pouvait être que lui.
Il se tourna vers Triss, les mains sur ses hanches soudain, un mouvement naturel un peu. Celui d'un amant. Quelques soldats de bas étages avaient déjà fait courir des rumeurs bien sûr, et une affection sincère existait bel et bien. Elle était l'apanage de deux êtres ne sachant déterminer s'ils étaient amis ou ennemis, cependant, elle était l'apanage d'un frère et d'une sœur un peu, car parfois ceux si se combattaient, car souvent ils se trahissaient, car ils s'entretuaient aussi. Il fallait connaître l'humain et la Chiss cependant pour comprendre, ce n'était certainement pas le cas de l'homme occupé à les suivre. Alors il y avait une chance bien sûr, une chance qu'il se laisse prendre à cette comédie alors que Seth baissait la tête un peu, comme pour un baiser volé, qu'il baissait les mains aussi, des hanches à la ceinture, de la ceinture au...

Blaster.

Celui de Triss, tout autant capable de tuer, tout autant capable de blesser. Seth se retourna alors, vif, et son bras trembla un peu mais il connaissait mieux que personne ses propres gestes maladroits. La seule chose pouvant compter ici, était l'impression de menace, et menaçant, Seth l'était. Son ombre état grande peut-être, mais lui plus encore, et les ténèbres au sol, il semblait comme les dompter alors, le bras tendu mais souple, l'arme menaçante, l'oeil noir, bien plus noir que Triss avait déjà pu voir peut -être.

« Montre-toi... »

Leur mystérieux poursuivant obéit, une arme également au poing. Un jour absolument normal à Coruscant... Lui aussi était grand, lui aussi était menaçant, casseur de primes également, tout comme Seth. Et querelleur aussi, surtout après avoir appris la mort d'un de ses rares amis. On pouvait le comprendre. Un peu.

D'un geste sûr, Seth plaça Triss devant lui. La jeune femme était protégée par son insigne, une Impériale, gradée qui plus est, ne pourrait être tuée ici sans conséquences... Après, l'initiative avait quelque chose d'un peu salaud, mais Seth assumait. Il connaissait également la force de son amie, ses capacités, et savait qu'elle saurait tout à fait comment le lui faire payer en temps voulu.
Des trahisons amicales, mortelles peut -être, elles finiraient bien par l'être un jour, mais amicales quand même...

 « Nous voilà dans une impasse on dirait, non Lieutenant ? L'Amiral va pas trop apprécier le retard, mais pas le choix... »

Aucun amiral ne les attendait, leur simple but avait été de se saouler un peu dans un bar tranquille, et de discuter peut être. Comme deux amis. Néanmoins une ruse, même grossière, de plus, pouvait toujours avoir un effet positif. Avec la Foi. Avec la Force aussi...

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Une vengeance sombre et vulgaire, rien de plus. Il s'en doutait bien sûr, il avait vite compris en reconnaissant les traits de l'homme pour l'avoir déjà croisé dans quelques cantinas, ou même, ombre informe, sur un contrat lui ayant échappé. Un mauvais type ? Pas plus qu'un autre, pas plus que lui peut-être, et Seth avait pitié de lui, de ses émotions. Etait-ce mal, de simplement vouloir venger un ami, lui donner une fausse justice pour une mort trop rapide ? Oui, oui cela l'était, car jamais une passion ne devait guider un corps, pas plus qu'une âme.
Alors oui, il y avait de la pitié dans les yeux de Seth, il y avait du mépris aussi, froid, sombre, semblable à une nuit d'hiver dans un cœur d'enfant cruel.

 « Ton ami a eu sa chance, je ne lui ai pas tiré dans le dos comme tu t’apprêtais à le faire pour moi. »

On pouvait discuter d'une mort, pas d'un affrontement. L'autre s'était débattu, avait attaqué aussi, et Triss avait essuyé le sang des blessures de ses propres mains. Un combat, rien de plus, ils avaient choisi de vivre pour la violence après tout, alors oui ils périraient par elle.
Le hurlement de l'homme retentit comme le glapissement d'un chien blessé. La plaie n'avait rien de mortelle, son simple but étant de neutraliser. Bien sûr, quelqu'un comme Triss était sûrement conditionné pour ce genre de réflexe, neutraliser, rendre prisonnier...garder apte pour un éventuel interrogatoire surtout, d'autres blessures. Parce que c'était comme cela qu'on interrogeait, pas de miracles...

 « Tu veux quoi, le rejoindre ? »

Pour un court instant, il y eu de la peur dans les yeux de l'homme, l'homme à terre, et Seth restait froid, impassible. Son visage portait la dureté d'un masque funéraire désormais, et quelque chose de sombre et d'obscur s'agitait alors, non pas les ténèbres mais bien la personnalité propre du chasseur de primes, lui la bête sauvage, la bête brimée.

 « Suffit que je tire là, entre les yeux, juste à bout portant.... Tu pourrais rejoindre ton pote comme ça. Enfin sur le papier, parce qu'on sait tous qu'en vrai, la mort c'est rien que ce grand vide inconscient.»

Accentuer la peur de l'autre, le ramener à un état de terreur profonde et de pure solitude. Un sourire craqua alors le masque de son visage, cruel lui aussi, froid, prédateur presque. Il n'y avait pas de folie pourtant dans les yeux sombres, pas de cauchemar, pas de tendresse, pas de pitié.

 « Si l'Empire voulait la mort de ton ami, il aurait simplement fallu le faire exécuter. Un peu de paperasserie et hop on en parle plus, si on suit la loi c'est un peu ce qu'il va se passer là pour toi en fait. T'as menacé un gradé... Vous en pensez quoi, lieutenant ? Votre justice ou la mienne ? La seule différence c'est le laps de temps entre maintenant et son exécution... Je suis beau joueur, je vous laisse le choix

Encore un jeu, encore une cruauté car c'était la morale de la Chiss que Seth tentait de séduire et de corrompre alors, elle qui pouvait libérer la bête ou bien l'entraver, lui rappeler ce qu'il était : son animal apprivoisé.
Il se désintéressa de leur prisonnier, ravançant vers Triss, la dominant de sa taille, la dominant de sa carrure, et son ombre engloutissait la sienne sans la moindre pitié. Il n'y avait personne dans la ruelle, personne si ce n'est eux, le lieutenant, le chasseur, et le mort en suspens...

 « Qu'est-ce que vous choisissez, un nouveau secret ou bien un peu de vérité pour une fois ? »

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Quelque chose brûla en son regard alors, non pas un sombre soleil comme Triss avait dû tant en voir déjà, mais un monde de forêts et d'incendies. Il y eut un silence entre les murmures, entre les choix aussi, et Seth en sembla comme plus lumineux, différent. Car ce à quoi la Chiss faisait appel, n'était rien d'autre que ses propres sentiments, et ils brillaient, et ils brûlaient... Il retroussa les lèvres un peu, un sourire, triste, secret, intime aussi, intime surtout.
Et le geste était violent en lui même, comme si le chasseur de primes s'écorchait vif soudain devant la jeune femme pour lui montrer la raison de tout cela. Une femme bien sûr, une femme qu'il aimait, cela ne se cachait plus. Et ce n'était pas une faiblesse alors que par les yeux, par le sourire, il lui confiait, non, ce n'était pas quelque chose que Triss pourrait utiliser contre lui...
Il partageait. Il partageait quelque chose d'une douceur extrême qu'il ressentait, une douleur aussi, une innocence...
L'innocence que la lieutenant désirait protéger tout en servant l'Empire, afin que s'installe dans la Galaxie un système politique compétent. Et ce que Seth lui disait, c'était simplement ceci : vois, cette innocence existe, je la ressens, je la protège c'est une lumière douce et fragile, et j'en paye le prix moi aussi. C'est ma raison....

 « Nous ne sommes plus à un secret près, en effet.... »

Derrière eux, l'homme eut un glapissement. Il pleurait, le bruit de ses sanglots possédant déjà un parfum de fatalité. Ses larmes étaient celles d'un condamné, même lui pouvait s'en rendre compte. Quant à demander la pitié....la douceur émanant du couple de complices était trop dure, trop triste également : ils ressentaient de la pitié, oui, pour lui, pour le mort précédent, mais cela ne changerait en rien le choix qu'ils prenaient ainsi, à deux.

 « C'est cependant à vous de tirer, puisque vous avez mon arme. Nous ne mentirons pas ainsi sur le blaster utilisé.... »

Une mise à l'épreuve encore, il n'arrêterait jamais. Car Seth avait deux proies aujourd'hui, l'homme à terre mais surtout la femme à ses côtés, et l'aura de solitude qui semblait l'envelopper alors avait le poids d'une lame entre vos omoplates, d'une trahison. Cela n'arrêterait jamais, il était l'ennemi du monde, l'homme éternel étranger, celui qu'on ne comprenait pas, qu'on ne comprendrait jamais. Une triste souffrance colorait ses joues d'un voile pâle à présent, alors qu'il se détournait de l'homme, de la scène, attendant la détonation avec une une certaine lassitude.

 « Vous vouliez faire cela à ma manière lieutenant, est ma manière est ainsi, alors tirez. Sur lui ou sur moi, ça, je vous laisse décider... »

Et pourquoi le chagrin, pourquoi la perte soudain, comme si le bleu du ciel pouvait ne plus exister, comme si ses yeux étaient aveugles à présent, ne verraient plus jamais. J'aime, voilà ce que battait son cœur douloureux, il y avait une douleur, il y avait une passion, il y avait une acceptation surtout. Une ombre trop grande, une ombre trop forte sous le poids des étoiles, et une accusation muette aussi : Oui, j'aime, et situ choisis d'en faire une arme contre moi, alors je redeviendrais l'animal et je te tuerai, car tu m'aurais prouvé que les sentiments n'ont aucune utilité.

Cela resterait, fil invisible pour les relier l'un à l'autre, oui cela resterait, une menace, un ultimatum....

 « Vous perdez du temps... »

Il pouvait fuir après tout, lui, l'horloge ne comptait que pour Triss, son rôle, ses obligations, lorsque Seth restait un fantôme de chair et d'exil que rien ne retenait vraiment. Pas ici, pas maintenant, éternel étranger de toujours...Et, ultime insolence, sa main jouait désormais de manière distraite avec le blaster impérial. A nouveau une chose étrange semblait comme l'envelopper, le porter, et l'homme ne semblait plus s'en rendre compte, alors même que cela le mettait en danger.
La Force.
Pouvait-il l'utiliser sur Triss, l'obliger à appuyer sur cette gâchette qui signifiait la vie propre d'un homme, la plier à sa volonté à lui ? Et grande était la tentation, en silence l'homme regardait la Chiss...

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Il lui rendit son blaster, ainsi que Triss le lui demandait, et la chaleur de sa paume avait imprimé sur la crosse un peu de sa propre sauvagerie, celle qu'il cachait, celle qu'il couvait tout au fond de lui. L'homme était mort les yeux fermés, ne supportant pas de voir le geste final, espérant aussi peut-être encore un peu. Son cadavre reposait dans l'ombre et la poussière, Aucune noblesse ne se lisait sur les traits vides de toute vie, la mort n'avait pas consenti à cet ultime cadeau. Non, c'était juste un pauvre abruti, mort sans l'avoir mérité vraiment, pas plus qu'il n'avait mérité de vivre peut-être, bien que la différence soit subtile. Est ce que quelqu'un le pleurerait, est-ce que quelqu'un porterait un vide au cœur de ne plus le voir, ne plus l'entendre ?
A cause de lui, à cause d'elle, deux ombres décidant d'un destin de plus, d'un destin de trop, et la mort était la seule solution possible peut-être.
Triss n'y prenait aucun plaisir, Seth devinait le dessin fin de ses muscles se tendre et se crisper, là, sous la peau fine, trop fine de la gorge. Comme si la jeune femme réprimait toute sa colère et son énervement dans un sanglot presque, il y avait de l'émotion dans ce geste, une émotion longue, profonde, qu'elle n'avait pas accordé au mort. En avait-elle seulement conscience, de ce petit tremblement, de cette ombre soudaine dans tout ce qu'elle était, tout ce qu'elle ressentait ? Il n'y avait pas que de la tristesse, non, richesse d'un cœur aux multiples battements...
Et pourtant, combien la croyaient dotée de sentiments ? Comme si le bleu de sa peau cachait une armure bien plus impénétrable que n'importe quel alliage, que son statut de soldat l'excluait des choses du cœur également. Qu'être femme se méritait et que, alien et gradée, Triss n'avait pas encore gagné.

Ils marchaient côte à côte à présent, la femme ne tremblait pas. Un meurtre laissait des traces, toujours, mais certaines ne pouvaient s'exprimer au delà de la fatigue, de la lassitude. Quelque chose d'inéluctable, quelque chose pour les condamner.

La ruelle déboucha sur une artère passante, l'homme dû fermer les yeux sous le mouvemen perpétuel et sa main chercha le coude de Triss pour simplement l'effleurer, se faire guider sans risquer un déséquilibre de plus. Une compréhension mutuelle entre les deux jeunes gens, eux incapables d'appréhender le monde comme la majorité. Alors ils se soutenaient tout autant qu'ils se trahissaient, et chaque coup dans le dos les faisaient se relever un peu plus, car la sincérité était là, serait toujours là.
Chacun cherchait en l'autre des réponses lorsqu'ils ne pouvaient en trouver eux-même, et ils ne s'abandonnaient pas, pas ainsi, pas malgré les secrets et les mensonges. Triss savait où regarder dans les yeux trop sombres de Seth pour y trouver l'étincelle de lumière, et lui savait quelle tristesse pouvaient cacher des mains qui pourtant ne tremblaient pas.

Ils franchirent les portes d'une cantina où régulièrement venaient de jeunes soldats, quelques gradés aussi parfois. Seth n'y était pas le bienvenue, quelques regards hostiles se posaient sur lui, il n'appartenait pas à leur monde c'était ainsi, mais Triss était des leurs, une manière pour elle de reprendre la main, de se rendre indispensable un peu plus pour justifier sa présence à lui, l'empêcher de se perdre aussi.

 « Je ressens tellement d'amour et d'affection envers ma personne, d'un coup... Vous n'avez toujours pas dit à vos collègues que j'étais l'arme secrète de l'Empire ? »

Chasseur de primes, pas le métier le plus gratifiant du monde, et Seth savait toujours se montrer au mauvais endroit, au mauvais moment, non loin de l'ombre de Triss, toujours, et jusqu'à quand le chien lui mangerait-il dans la main ?

 « Vous m'offrez un morceau ? Et si c'est vous qui commandez, je crois que personne crachera dans mon verre ou mon assiette. »

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Bercé par les murmures de l'endroit, Seth ferma les yeux. Il y avait quelque chose d'étrange, de glaçant presque dans sa position alors apaisée, lui, le corps trop souvent en tourment. Car une paix l'habitait alors, une paix qu'il trouvait ici, dans un lieu hostile où bien des regards semblaient le condamner, où seule Triss, douce amie, tendre ennemie, pouvait le protéger selon un vouloir qui n'appartenait qu'à elle lorsque de l'homme, elle pouvait réclamer vengeance.
Vengeance pour le fou qu'ils avaient tué, vengeance pour le regard que parfois sur elle, il posait, comme pour la pousser un peu plus au bord d'un gouffre que seuls eux pouvaient voir.

 « En fait, je crois même m'être un peu ennuyé, pas vous ? »

Il souriait, cruel un peu, comme un enfant aussi, comme un enfant surtout, et ses yeux brillaient.
La bière était fraîche, leurs plats sentaient bons, il y avait de quoi être heureux ici. Un peu plus loin, un homme, un jeune cadet, haussa un peu le ton, il parla de pourriture sans sentir l'odeur de celle qu'il portait au cœur. Lentement, Seth commença à manger. Il songea à l'homme abandonné, au cadavre, à sa chair pourrissante, et la viande lui glissait le long de la gorge alors. Il avala. Un dé roula sur une table un peu plus loin, quelqu'un lança un pari, un autre fit admirer le bel ouvrage sur la lame d'un couteau à un ami. Ils étaient dans un micro-univers ici, un micro-univers de violence et de brutalité, seul le grade comptait. Seth n'en possédait aucun, encore une fois il se présentait là où toujours il serait étranger....
Quelques jeunes gens essayaient de les regarder, ils voulaient venir, approcher, espérer de leur lieutenant quelque chose, qu'elle les écoute sans les renvoyer, mais il y avait lui, le Chasseur. Et leurs âmes peut-être un peu trop romantiques s'imaginaient-elles Triss donner un contrat à l'homme sombre, l'homme aux yeux tristes. Entendre un nom alors pouvait devenir dangereux, on mourait facilement dans les rangs de l'Empire, la jeunesse n'empêchait rien.

 « Pas mal d'admirateurs on dirait, Lieutenant.... »

Un rire bref, semblable à l'aboiement soudain d'un chien. Parce qu'il y avait toujours quelque chose d'animal, de sauvage dans les yeux noirs, et ses gestes étaient délicats alors, les grandes mains, les longs doigts qui s'agitaient dans une lenteur presque surréelle pour prendre le verre, pour manger un peu. Il y avait une douceur aussi, dans le mouvement de ses mains encore, dans le petit coin tordu de son sourire, et si quelques mèches lui retombaient devant les yeux, cela ne semblait que rajouter encore plus à une jeunesse qu'il possédait encore.

 « Et sinon, toujours personne à assassiner sous le manteau ? Il y a quelque chose d'absolument honorable et désuet dans votre manière d'être. Cruelle mais avec une morale.... parfois je me frotte la peau pour voir si elle n'est pas bleu un peu, des fois que l'on m'ait caché l'existence d'une sœur. »

Un rire encore une fois, un regard un peu pensif aussi, un peu timide. Une offre de paix, une armistice jusqu'au prochain combat : vois, je pense toujours à toi. Car elle était une amie chère, tout autant qu'une ennemie respectée, car il y avait de l'amour en lui aussi lorsqu'il la regardait, qu'il pouvait embrasser son front ainsi que le faisait un frère, qu'il saurait la porter elle, elle et son corps écorché quand la bataille de trop sonnerait alors.

Il ne pouvait y avoir de fin heureuse pour elle, pour eux, et c'était pitié bien sûr, pour leur amitié, pour toutes les choses que chez l'autre ils détestaient. Brusquement, la bière devint amère, il n'en sentit plus l'ivresse, juste la tristesse. Et de sa bouche il forma quelques mots aux syllabes douloureuses bien que l'homme s'appliqua pourtant malgré sa gorge peu habituée. Le Cheun, s'il n'entendait pas Triss le parler, une fois, au moins une fois, il avait voulu voir, se renseigner. Prononcer son prénom aussi, le prononcer en entier, en remerciement pour le repas, en paix toujours, pour l'homme qu'ils avaient tué, pour le secret qu'il lui avait confié de son cœur battant, de son cœur écorché.

La Force soit avec toi, Feht'ris'sharo

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Il souriait, et elle aussi du moins Seth l'imaginait. Parce qu'il y avait différentes teintes de rouges dans son regard, parce qu'il savait quelle lionne elle cachait en son cœur, et pour un instant il n'y eut entre eux que ce lien d'une infinie tendresse. Le sourire de l'homme disait tout bien sûr, il n'avait besoin de mettre de mots dessus, et elle aussi, elle savait lire en lui : Soyons honnêtes, tu ne me lâches jamais la grappe..
Ils impressionnaient tous les deux, bien sûr qu'ils impressionnaient, et Triss avait raison même si son compagnon ne pouvait le voir : certain des cadets et simples soldats présents les regardaient avec envie, le regardait avec envie. Quelque chose d'infiniment romantique se dégageait alors, non pas dans le sens d'une quelconque relation amoureuse, mais bien dans chacune des valeurs que les deux amis véhiculaient, qui s'affrontaient parfois. Car quelque chose de plus fort en ressortait, car ils étaient à la même table aujourd'hui, qu'ils avaient trinqué ensembles avec une désinvolture que parfois même deux frères d'armes ne pouvaient posséder.
On les laissait tranquille, certains continuaient de les dévisager avec véhémences, mais ce que les deux amis prononçaient, seuls eux pouvait l'entendre.
La phrase en Cheunh lui étrangla la gorge un peu, certaines syllabes semblèrent se coincer mais l'homme était au moins heureux d'avoir compris le système d'appartenance dans la grammaire impossible qu'était la langue.
Triss sembla surprise, son but premier à vrai dire. Mais le cadeau du chasseur de primes n'était pas empoisonné, pas cette fois ci. Une simple marque de respect à vrai dire, car il lui en avait par trop manqué dans cette simple journée. Venait toujours le moment de l'armistice alors un cessez-le-feu auquel la jeune femme refusa de se plier.
Parce qu'elle répondit, et lorsque Seth ferma les yeux on aurait pu croire qu'il s'agissait simplement de concentration, comprendre les mots, comprendre la phrase étrangère dont la construction variait subtilement de ce que lui-même avait prononcé....
Il n'en était rien. L'homme ferma les yeux, oui, simplement pour ne pas voir son monde s'écrouler. Cela dura une demie seconde à peine, et rien ne semblait montrer son trouble alors, sauf que Triss le connaissait, s'était battue avec lui, contre lui dans chacun de leurs entraînements. Des entraînements   où personne d'autre ne venait, malgré les rumeurs que cela engendrait alors. Il n'y avait qu'elle pour voir la silhouette massive, musclée de l'homme devenir maladroite parfois, puis prendre un élan soudain, passer autre ce que la nature simple semblait lui avoir donné comme fardeau. Le temps des questions n'était jamais venu, il n'y avait que les réponses....

L'homme se leva, un aveu. Oui, la Force était avec lui et cela était risible presque un peu. Parce qu'il n'y avait pas de quoi le reconnaître jedi pour autant, parce qu'il n'en semblait alors que plus étranger, plus différent. Le voyait-elle saigner à mort, comprenait-elle les ténèbres qui un jour seraient là ? Il y avait de la tristesse dans les yeux noirs, il y avait un poids, une fatalité. Quelque chose aujourd'hui avait changé, ce n'était pas le mort, ce n'était pas l'amour que l'homme portait au cœur, non, c'était la vérité simplement.
La vérité qui venait d'être dite, s'abattant entre eux comme s'abattait le sabre du bourreau.
Il quitta le bar ben sûr, parce qu'elle le suivrait évidemment. Et ce n'était plus la peine de jouer à l'handicapé, plus avec elle. Cela aussi faisait mal, cela aussi renvoyait à une autre forme de solitude  dans la douleur et le silence. Son instinct le guida dans les rues et ruelles jusqu'aux endroits les plus obscurs, les plus déserts. Ses pas étaient lourds un peu, ceux d'un homme avec un fardeau, ceux d'un homme avec ses doutes et ses tristesses. Et lorsqu'il se retourna, il y avait un sourire comme une cicatrice sur son visage en peine.

 « Alors quoi, devons-nous nous battre ? »

Il l'avait su bien sûr, qu'un tel jour viendrait. L'homme continua de la regarder comme l'on regarde une sœur, car parfois, frères et sœurs pouvaient se révéler ennemis..Il ne lui sembla pas regretter chacun des mots qu'il avait pu avoir, ainsi que son front pensif le révélait un peu, oui elle était bien sa sœur, oui elle le resterait, et la main de l'homme s'éleva alors, se posant sur la joue de la jeune femme dans une tendresse qu'il ne simulait pas.

 « Il n'y a ren à regretter, cela a été de beaux moments n'est-ce pas ? »

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